La contre-révolution cathodique
Créé par sr07 le 02 mai 2008 à 5:47 | Dans : a-le quartier libre de XD, a3-Civisme, citoyenneté et militance
J’ai regardé avec intérêt, hier au soir, l’émission de télé sur Georges Marchais le cathodique, avec comme titre principal : « part de Marchais ». Sans doute faisait-il recette à l’audimat, ce secrétaire général d’un PC résolument engagé dans l’union de la gauche en ces années 70.
Georges Marchais combinait alors deux atouts. Celui de représenter un parti au score électoral encore élevé (un électeur Français sur quatre) et surtout ce tempérament, cet aplomb et ce culot d’acier qui prêtaient à rire. L’émission traduit formidablement cette révolution de la com’ chez ce dirigeant communiste en totale rupture avec ses prédécesseurs formés dans la tradition tribunitienne des meetings mais parfaitement incapables de présence cathodique, supposant un ton assuré et spontané mêlant humour, roublardise et réactivité.
Souvenez-vous les difficultés éprouvées dans ses débuts télévisuels par un François Mitterrand qui se rattrappa fort bien par la suite. Exit avec VGE, le style conférence de presse du Général pourtant si génial dans ses réactions et boutades publiques. Les années 70 marquent une énorme évolution de l’homme médiatique public. Pour le meilleur et pour le pire. Un peu pitre, Georges Marchais avait nous dit-on de l’appétit médiatique. Une attitude de fauve ! Les journalistes témoignent de ce tempérament quand ils se trouvaient eux-mêmes pris en proie alors qu’ils croyaient prendre ! Les grands succés de Georges Marchais ne tenaient-ils pas à sa capacité d’en imposer aux forts en thèmes déstabilisés par sa gouaille emportée et son style offensif ?
Ces succés médiatiques ont accompagné, il est vrai, une attitude plus ouverte du PCF sur l’évolution du monde dans une conjoncture nouvelle : » le socialisme aux couleurs de la France » sous l’influence d’un Juquin ou d’un Fiterman et l’eurocommunisme prôné par les dirigeants italiens et espagnols. La perte d’audience du dirigeant français n’alla -t- elle pas de pair avec le retour à une posture plus sectaire d’un PCF en butte à l’hégémonie de ses alliés socialistes, tentés alors par « le virage à droite »?
La rupture des négociations sur le programme commun entame alors un lent processus d’érosion du PC. Georges Marchais n’est plus à l’affiche dès son raté télévisuel en direct de Moscou lorsqu’il justifie l’invasion de l’Afghanistan par les soviétiques. Nous sommes alors en pleine crise des relations internationales avec un durcissement des rapports des deux super blocs (en toile de fond des années quatre vingt : la guerre des étoiles conduites par les américains, l’implantation des SS20 soviétiques à l’Est et des fusées Pershing en Europe occidentale ) .
Il y aurait beaucoup à dire sur le discrédit qui fut alors jeté sur le dirigeant communiste car, au-delà de sa personne n’était-ce point aussi l’effet des croisades anti-communistes et la poussée du néo-conservatisme avec Thatcher et Reagan ? Quoi qu’il en fût, Geoges Marchais ne pouvait compenser son déficit politique par sa présence médiatique, laquelle fut fortement entamée durant ce processus de décomposition électoral engagé dès les années 80. En fin d’émission, le témoignage de Pierre Juquin traduit assez bien ce basculement et relativise l’effet médiatique vis à vis du fond.
Une tout autre question reste pendante : celle de la surmédiatisation des hommes publics au détriment des débats de fond qui n’ont plus cours dans les grands médias. Une question importante pour le devenir de notre démocratie.
X D
5 réponses to “La contre-révolution cathodique”
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merci à toi, oui j’en parle un peu, mais surtout de son intervention, ce qu’elle m’a laissé , plutôt que sa vie, ou le contexte que je connais assez mal..mais j’ai mis en lien en gras le club qui l’invite et a surement beaucoup plus d’éléments pour les lecteurs..
a bientôt
Je vois que tu parles se Rigoberta sur ton blog et je conseille à tous de s’y rendre en cliquant sur Dominique ou bien en allant sur mes liens un peu d’oxygène hors du bocal (ça s’est vrai !).
bonsoir,
Justes croisés,oui, c’était un grand moment que d’écouter cette femme, et j’avoue ignorer son existence jusque là…merci donc à Vincent Simon et son club de nous l’avoir faite venir et découvrir…Sacrée femme, totalement engagée dans son combat, et en même temps, si pudique sur tout cela…
Pour Marchais, née en 67, je me souviens d’interventions gamine, vers 9/10 ans ou j’écoutais un peu ça je crois…mais c’est lointain…un peu avant peut-être..j’ai le souvenir de ces moments ou les queues pour manger en URSS étaient niées fermement …ou créaient l’étonnement..ca ne passa pas bien dans ma famille, cette pseudo naîveté, pour ma mère en particulier…qui a comme beaucoup connu l’occupation et tout ce qui va avec…
Salut Domi,
Nous nous sommes juste entrevus lors de la conférence avec Rigoberta Menchu. C’était un grand moment. Non? Avec cette spontanéité, cette capacité et cette profondeur. sa médiatisation n’est pas surfaite pour ce qui la concerne. Après ce combat sanglant qui vit éliminer plus de 150000 de ses concitoyens engagés dans la même résistance. Et même lors du dernier scrutin, plus de 50 morts je crois. Et dans ce combat là, une sérénité absolue.
Quant à Marchais, ça me fait un choc de lire que tu étais petite fille ! Il est vrai que j’ai commencé presqu’en culotte courte à faire de la politique mais malgré tout, c’est vrai que j’étais déjà à la fac quant les althussériens de l’UEC engageaient leur critique radicale et se mettaient enfin à considérer avec plus de respect les sociaux-dem. Balibar était leur invité. Quant à nous nous ne les appelions plus les « stals ». Alors Marchais ça les faisaient drôlement rigoler quand on se retrouvaient au meeting. Ils étaient mille fois plus critiques que nous envers celui qui restait le patron du PCF !Nous nous savions l’importance de l’union pour la suite. Coûte que coûte !
je n’ai pas vue l’émission , mais je me souviens bien petite fille des interventions de G. Marchais, de ses apparitions spectacle, car il y a vait de cela , seulement, il y croyait, il ne jouait certainement pas tant que nos hommes politiques d’aujourd’hui. Parfois il disait des énormités, s’entétait à faire rire même les gosses…mais il y avait de l’engagement…
Aujourdhui, la parade du discours a pris la place du débat de fond , comme tu le soulignes, et malheureusement, les quelques émissions qui tentent l’aventure ne permettent guère une prise de risque, de position politique …tous partis confondus, beaucoup se retranchent derrière « la ligne » ou bien derrière » le rapport » citant chacun leur tour chiffres et analyses toutes prêtes…necessaires certes, mais pas que cela..
Et puis au fond, est ce que cela n’est pas plus rassurant pour la plupart des gens qui préfèrent entendre cela…et faire comme si…?