Energique et volontaire, telle m’apparaît Martine Aubry. A bien des égards, franche et sympathique aussi. Ambitieuse ? Sans doute mais avec du fonds ! Cette bosseuse en fit voir, dit-on, à ses collaborateurs successifs ! Son parcours ? Pour ce que j’en sais très droit et marqué d’un delorisme congénital. Elle n’y peut rien. C’est sa filiation naturelle et intellectuelle.

 Un peu « seconde gauche » et transcourant (cf son épisode au sein du club « Témoin »! ), elle a voulu oeuvrer utile, encore jeune énarque, en préparant les lois du député Jean Auroux. Qu’en reste-t-il aujourd’hui ? Ce ne sont pas tant ces droits nouveaux votés par un parlement rose qui importent le plus mais peut être leur signification dans la « France socialiste » de l’époque paradoxalement fascinée par le modèle japonais et « les cercles qualité ». Je me souviens de ce temps où nous voulions assumer à gauche cet impossible compromis social avec un patronat pourtant bien campé sur ses positions de classe. Nous osions demander « de nouveaux droits pour les travailleurs » en échange « de nouveaux marchés pour les entrepreneurs ». Ce fut en fait plus de flexibilité pour gagner - disait-on au nom de la politique de l’offre – des parts de marché.

Plus tard, Martine Aubry promut les CES avant d’inventer les Emplois-Jeunes. Mieux que les TUCs lancés bien avant par Laurent Fabius, mais marqués de la même ambivalence. La ministre volontaire n’eut pourtant de cesse de vouloir faire reculer cette précarité alimentée par un néolibéralisme ne rencontrant aucune résistance de la part d’une gauche socialiste pratiquant la fuite en avant dans une Europe du « Grand Marché » toutes voiles ouvertes à la mondialisation capitaliste.

Elle  reprit son combat plus tard sous Jospin avec la CMU, les Emplois-Jeunes et les trente cinq heures qui lui valurent l’animosité conjuguée des bas salaires et de larges secteurs du patronat. En responsabilité dans les services publics de l’emploi et de la santé, j’ai pu, par ailleurs, apprécier professionnellement son oeuvre aux ministères du Travail, de l’Emploi et de la Solidarité. Bilan d’ensemble mitigé mais qui reste impuissant à prendre à bras le corps les défis du temps présent. Ceux du chômage, du pouvoir d’achat et de la précarité.

Malgré son mauvais caractère notoire, dénoncé par son entourage militant ou professionnel, Martine Aubry reste tout auréolée d’une image de droiture et de dévouement à la chose publique. En dépit des attaques sur sa personne du fait des trente cinq heures, l’ancienne ministre est réputée plus sereine que sa rivale, jugée parfois trop exaltée. Martine, cette battante sait à vrai dire imposer un style volontaire qui plaît à gauche. Réputation surfaite ? Avec Ségolène nul ne disconviendra qu’elles possèdent toutes les deux un sacré tempérament ! Reste à l’employer utilement !

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