Martine Aubry : Un réformisme moderniste chevillé au corps
Créé par sr07 le 25 nov 2008 à 23:23 | Dans : a3-Civisme, citoyenneté et militance
Energique et volontaire, telle m’apparaît Martine Aubry. A bien des égards, franche et sympathique aussi. Ambitieuse ? Sans doute mais avec du fond ! Cette bosseuse en fit voir, dit-on, à ses collaborateurs successifs ! Son parcours ? Pour ce que j’en sais très droit et marqué d’un delorisme congénital. Elle n’y peut rien. C’est sa filiation naturelle et intellectuelle.
Un peu « seconde gauche » et transcourant (cf son épisode au sein du club « Témoin »! ), elle a voulu oeuvrer utile, encore jeune énarque, en préparant les lois du député Jean Auroux. Qu’en reste-t-il aujourd’hui ? Ce ne sont pas tant ces droits nouveaux votés par un parlement rose qui importent le plus mais peut être leur signification dans la « France socialiste » de l’époque paradoxalement fascinée par le modèle japonais et « les cercles qualité ». Je me souviens de ce temps où nous voulions assumer à gauche cet impossible compromis social avec un patronat pourtant bien campé sur ses positions de classe. Nous osions demander « de nouveaux droits pour les travailleurs » en échange « de nouveaux marchés pour les entrepreneurs ». Ce fut en fait plus de flexibilité pour gagner - disait-on au nom de la politique de l’offre – des parts de marché.
Plus tard, Martine Aubry promut les CES avant d’inventer les Emplois-Jeunes. Mieux que les TUCs lancés bien avant par Laurent Fabius, mais marqués de la même ambivalence. La ministre volontaire n’eut pourtant de cesse de vouloir faire reculer cette précarité alimentée par un néolibéralisme ne rencontrant aucune résistance de la part d’une gauche socialiste pratiquant la fuite en avant dans une Europe du « Grand Marché » toutes voiles ouvertes à la mondialisation capitaliste.
Elle reprit son combat plus tard sous Jospin avec la CMU, les Emplois-Jeunes et les trente cinq heures qui lui valurent l’animosité conjuguée des bas salaires et de larges secteurs du patronat. En responsabilité dans les services publics de l’emploi et de la santé, j’ai pu, par ailleurs, apprécier professionnellement son oeuvre aux ministères du Travail, de l’Emploi et de la Solidarité. Bilan d’ensemble mitigé mais qui reste impuissant à prendre à bras le corps les défis du temps présent. Ceux du chômage, du pouvoir d’achat et de la précarité.
Malgré son mauvais caractère notoire, dénoncé par son entourage militant ou professionnel, Martine Aubry reste tout auréolée d’une image de droiture et de dévouement à la chose publique. En dépit des attaques sur sa personne du fait des trente cinq heures, l’ancienne ministre est réputée plus sereine que sa rivale, jugée parfois trop exaltée. Martine, cette battante sait à vrai dire imposer un style volontaire qui plaît à gauche. Réputation surfaite ? Avec Ségolène nul ne disconviendra qu’elles possèdent toutes les deux un sacré tempérament ! Reste à l’employer utilement !
Billet de X D écrit le 2 juin 2008
3 réponses to “Martine Aubry : Un réformisme moderniste chevillé au corps”
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De l’envoyé spécial à Lorient (Morbihan)du Figaro, François-Xavier Bourmaud
29/06/2009 |
Lors d’une réunion publique avec ses proches à Lorient, l’ancien premier secrétaire du PS a proposé un contrat de l’après-crise.
Il n’est pas venu pour parler des affaires internes du PS. Pas non plus pour officialiser la création de ce qui pourrait être son courant. Encore moins pour se déclarer candidat à d’éventuelles primaires socialistes pour l’élection présidentielle de 2012. Voilà du moins ce qu’a assuré François Hollande samedi à Lorient, en marge d’une réunion de son association Répondre à gauche, devant quelque 500 sympathisants. Non. Pour l’ancien premier secrétaire du PS, il s’agissait avant tout de replacer le parti sur le terrain du débat d’idées.
«Je ne suis pas là pour ajouter une personne de plus, un courant de plus. Je ne suis pas là pour faire une annonce de plus, une procédure de primaire en plus», avait prévenu le député de Corrèze, avant la réunion.
Mais quand même. Le mauvais état du PS au sortir des élections européennes était la toile de fond de la réunion, l’échéance présidentielle de 2012, son horizon. Quand les intervenants de la matinée ont tenté de répondre à la question : «Qui sommes-nous ?» en plaidant pour une réappropriation des valeurs de la gauche, François Hollande a, dans son discours de clôture, prolongé la question en se demandant «Où allons-nous ?».
«Comme il a été possible de nouer un contrat de l’après-guerre, nous devons écrire avec nos concitoyens le contrat de l’après-crise», a-t-il lancé avant de proposer un triple pacte pour la France : productif, éducatif, redistributif. Le premier volet de ce pacte s’adresse aux entreprises et à leurs salariés pour lutter contre le chômage, garantir la formation professionnelle et favoriser la croissance verte. Le deuxième vise à faire de la France «l’une des nations les mieux formées du monde». Le dernier concerne notamment la fiscalité avec une proposition : que tous les revenus «soient soumis au prélèvement progressif national, local et social».
Nouveau séminaire en septembre à Périgueux
Et comme il s’agissait aussi de préparer la stratégie pour 2012, François Hollande l’a assuré : «C’est autour de ce contrat que doit se rassembler la gauche.» Car «un PS seul et c’est l’alternance qui se trouve empêchée», a-t-il dit en présence de l’ancien patron du PCF Robert Hue et du Vert Jérôme Gleizes. Pour Hollande, cette démarche de rassemblement «doit trouver un premier acte dans la préparation des régionales».
L’occasion de critiquer la «maison commune» de la gauche que défend Martine Aubry et l’idée d’organiser des primaires ouvertes à l’ensemble des formations de gauche pour désigner le candidat de la prochaine présidentielle. «À la différence de la droite, la gauche n’est pas fongible dans un seul parti (…) De même, le choix d’un candidat commun ne peut être un préalable mais éventuellement un aboutissement», a martelé François Hollande.
Ce faisant, l’ancien premier secrétaire du PS se défend de vouloir jouer sa carte en marge du parti. L’un de ses proches, le député Bruno Le Roux, l’assure même en désignant le grand écran sur lequel figure le logo du parti, le poing et la rose : «Nous ne menons pas la réflexion à côté du PS. Nous ne sommes pas dans la confrontation avec la direction.» Mais un autre déplore tout de même que les «hollandais» ne soient «pas vraiment associés à la direction. On ne nous a pas beaucoup demandé de travailler».
Ils participeront au séminaire de Martine Aubry le 7 juillet pour définir le cadre de préparation du projet socialiste. Mais ils continueront aussi à travailler dans leur coin. En septembre, ils se réuniront à Périgueux pour un nouveau séminaire. Histoire d’aider François Hollande à rester dans la course pour 2012.
Par Daniel Schneidermann dans Libé
Au moins, on en aura appris de belles sur la personnalité de Martine Aubry. Et notamment une information capitale : la chef de l’opposition s’ennuie à Paris. Elle s’ennuie à mourir. Elle vient au supplice deux jours par semaine, en traînant les pieds. Elle s’épanche, mais elle endure. Elle est à deux doigts de la dépression, mais elle tient bon.
Tous les hebdos de l’après-européennes révèlent cette triste réalité, comme un seul journaliste. Par ordre de brutalité croissante dans la révélation, citons d’abord le Point. Sous la plume de Michel Revol, il fait parler la députée socialiste Marisol Touraine, laquelle déplore que les militants locaux «ne voient jamais Martine». Le Point raconte aussi un bureau national pendant lequel Aubry «fait son courrier» en attendant la fin des échanges. L’Obs (Matthieu Croissandeau) cite une confidence, faite par Aubry à un proche : «Si tu savais comme tout cela m’emmerde.» Et l’article estime qu’elle «frise parfois le déni de réalité».
Mais c’est dans l’enquête de l’Express, signé de Marcelo Wesfreid, et titré «Aubry, capitaine à reculons» que l’on perçoit le plus clairement la tragédie aubryenne. Elle «zappe les fêtes de la rose». «La question de son manque d’appétit pour la fonction enfle.»L’Express cite «un cadre» : «La gestion au quotidien de Solférino la rase.» Et le journaliste de raconter, sourire en coin, comment elle «s’enflamme» à Lille, en faisant visiter à un groupe de journalistes une exposition consacrée aux conditions de vie dans les anciens pays de l’Est. On y voit une pièce aux papiers peints fadasses «dans laquelle les familles peuvent s’installer pendant une heure, en s’inscrivant à l’avance», décrit la maire.
Apprenant donc brutalement à quel point Aubry s’ennuie à Paris, on repense d’abord à tous les éléphants socialistes, au cours de la soirée télévisée électorale. Ils disaient deux choses : d’abord, «elle n’est pas en cause, pas question de la dégommer». On le comprend mieux aujourd’hui, ayant lu les hebdos (et supposant évidemment que ces informations étaient sues par les éléphants, et qu’ils ne les ont pas apprises dans la presse). N’occupant pas vraiment son poste, Martine Aubry ne représentait un danger pour aucun d’entre eux. Il urgeait donc de la maintenir à la place qu’elle occupe si peu. «Maintenant, elle va vraiment aussi devoir rénover le parti», disaient aussi les éléphants, sachant donc pertinemment que l’intermittente n’était pas en position de rénover quoi que ce soit.
Mais ce n’est pas tout. Le traitement, par les journalistes, du «cas Aubry» avant les résultats de l’élection, est aussi intéressant. Il faut mesurer l’ampleur de la transgression que représente le comportement d’Aubry, aux yeux des journalistes solfériniens. Le journaliste solférinien est une espèce particulière, qui ne connaît qu’un sujet digne d’intérêt : les rivalités d’appareil, avec une préférence pour le feuilleton Aubry-Royal, véritable providence. (Le syndrome s’étend d’ailleurs au-delà des journalistes solfériniens. Il fallait voir, par exemple, dans la dernière livraison d’Envoyé spécial, Aubry attendant Zapatero, et harcelée par les reporters des radios, pour lui arracher une réaction «à chaud» au fait que Royal ne manifesterait pas à ses côtés le 1er mai).
Par ailleurs, on peine à croire que les journalistes politiques, qui suivent la direction du PS depuis longtemps, ne connaissaient pas tous ces détails, et n’avaient pas bénéficié de ces confidences, avant le 7 juin. Ils avaient donc mesuré la profonde inadaptation de la chef de l’opposition à son job, mais ils ne le disaient pas. Pourquoi ? Peur de «casser» le PS ? Si les résultats avaient été moins mauvais, l’auraient-ils dit, ou auraient-ils loué la «sagesse» de la maire de Lille, son intelligence à se tenir, à Lille, à l’écart des luttes d’appareil ? «Aubry déteste son nouveau boulot» : l’information n’est donc pertinente qu’après coup, validée par un échec chiffré, tangible. Les journalistes qui voyaient Aubry s’ennuyer ne croyaient pas ce qu’ils voyaient. Ils attendaient que le scrutin le confirme.
Il arrive souvent qu’on ne croie pas ce qu’on voit. Autre exemple : Hadopi. Voir pendant des mois le Président, le gouvernement, la majorité, s’acharner à tricoter une loi qui permette à l’administration de couper la connexion Internet à des particuliers, avait fini par émousser les étonnements. On se dit qu’on voit mal, on se méfie de son tropisme d’internaute. Et il faut que le Conseil constitutionnel écrive noir sur blanc que cette loi portait atteinte à «la liberté de parler, d’écrire, d’imprimer librement», pour qu’on réalise enfin ce que l’on venait de voir. Il est vrai que ce grand principe de 1789 était apparu au fil des décennies bien théorique, et réservé aux professionnels. Internet, pouponnière de micromédias, lui a redonné une nouvelle jeunesse. Le Conseil constitutionnel vient de l’acter. Les conséquences en sont encore imprévisibles.
Laure Bretton Reuters 5/12/2008
Ségolène Royal a basculé vendredi dans l’opposition interne au Parti socialiste, rejetant la ligne politique proposée par Martine Aubry et refusant d’entrer dans sa direction qui doit être dévoilée samedi.
Martine Aubry présente son équipe sans rallier celle de Ségolène Royal
L’image du Parti socialiste toujours dégradée, selon l’IFOP
Aubry ouverte à un rassemblement avec l’équipe Royal dans l’avenir, selon son bras droit
Vincent Peillon et Manuel Valls, deux des principaux lieutenants de l’ancienne candidate présidentielle, ont souligné les insuffisances, à leurs yeux, du « texte d’orientation politique » que leur a transmis la maire de Lille.
« Les conditions de la rénovation et du rassemblement ne nous semblent pas réunies » dans ce document élaboré « dans la forteresse de Solférino », le siège du PS, et « sans nous toute la semaine », a déploré le premier, qui est député européen.
Il a dénoncé les « faux débats » et les « fausses querelles » attisés selon lui par le nouveau premier secrétaire et les deux autres courants incarnés par le maire de Paris Bertrand Delanoë et le représentant de l’aile gauche du PS Benoît Hamon.
Lors du congrès de Reims, ces trois sensibilités avaient déjà recherché les conditions d’une alliance pour contrer les ambitions de Ségolène Royal. Les discussions avaient achoppé sur le « dispositif humain » — le nom d’un candidat commun.
« Nous ne pouvons que regretter que la porte se referme sur Ségolène Royal », a déclaré Manuel Valls.
Plusieurs points prennent le contrepied de la ligne défendue par Ségolène Royal dans le « texte d’orientations politiques 2008-2011″ de neuf pages que Reuters s’est procuré et qui rejette notamment de baisser les cotisations d’entrée au PS, une des revendications de l’ancienne rivale de Nicolas Sarkozy.
HAMON PORTE-PAROLE?
Il y est écrit noir sur blanc que le PS refuse « toute alliance avec le Modem » que les adversaires de la présidente de Poitou-Charentes l’accusent de vouloir favoriser.
Le document stipule aussi que le PS ne peut « se transformer progressivement en un parti au service d’une candidature », une autre pierre dans le jardin de Ségolène Royal, qui ne cache pas sa volonté de se représenter à la présidentielle en 2012.
Samedi, les « royalistes » s’abstiendront donc lors du vote au Conseil national qui doit entériner cette ligne ainsi que la composition de la nouvelle direction. L’ex-candidate à l’Elysée, elle, ne devrait pas assister à la réunion, prévue à Paris.
« Sur le plan idéologique, l’Europe, l’économie, ils n’ont aucune raison de refuser ce texte », commente un ancien ministre rallié à Martine Aubry. « C’est dommage qu’ils s’excluent ».
Après avoir obtenu un tiers des suffrages lors du vote sur les programmes politiques, début novembre, Ségolène Royal a été battue de 102 voix par Martine Aubry lors de l’élection pour le poste de premier secrétaire.
Depuis qu’elle a été déclarée gagnante, après quatre jours de confusion et d’invectives, l’ancienne ministre de l’Emploi est à la recherche d’une majorité solide pour gouverner un PS profondément divisé depuis l’échec face à Nicolas Sarkozy, troisième défaite présidentielle consécutive.
Début novembre, la motion Aubry n’a obtenu que 24% des voix et, en plus des discussions avec Delanoë et Hamon, elle doit composer avec des alliés venant d’horizons très différents comme Laurent Fabius ou les proches de Dominique Strauss-Kahn.
L’équipe Aubry devrait se diviser en deux pôles: d’un côté un « contre-gouvernement » avec une quinzaine de secrétaires nationaux chargés de réagir aux propositions de la droite et des dirigeants « fonctionnels » chargés d’animer le parti.
François Hollande, premier secrétaire sortant, et Bertrand Delanoë n’y siégeront pas. En revanche, Benoît Hamon devrait devenir le nouveau porte-parole du PS, a-t-on appris dans l’entourage du maire de Paris.
« Ce rassemblement est non seulement bancal sur le plan idéologique mais précaire temporellement et cimenté par le refus du rassemblement », a conclu Vincent Peillon.
Edité par Yves Clarisse