juin 2010

Archive mensuelle

La France à la reconquête de son destin

Créé par le 27 juin 2010 | Dans : Blog du Che, Fédérations MRC d'Aquitaine

 

Discours de clôture de Jean-Pierre Chevènement au Congrès du Mouvement Républicain et Citoyen, Paris, dimanche 27 juin 2010.

Dans moins de deux ans d’ici, l’élection présidentielle qui est, dans le système politique français, l’élection primordiale, « la mère des batailles » en quelque sorte, nous donnera, si nous le voulons, l’occasion de peser pour redonner à notre pays, non pas un futur comme aujourd’hui, mais un avenir.

Le MRC est avant tout une ligne politique, indissociablement au service du monde du travail et au service de la France, continue dans la durée, à la fois cohérente et exigeante, ambitieuse enfin pour la République et pour la nation. Je vous parlerai de la crise qui est devant nous, des perspectives qu’elle offre à notre projet et enfin des moyens que nous avons de peser d’ici 2012 et après.

I – La crise

Elle est fondamentalement celle du capitalisme financier dont nous avons combattu la mise en place en France et en Europe, dès 1983. Elle est aussi la crise de la monnaie unique, celle de l’euro que nous avions prévue depuis la création de celui-ci en 1992 par le traité de Maastricht. Il n’y avait pas besoin d’être grand clerc pour deviner que l’abandon de la souveraineté monétaire à une Banque Centrale européenne indépendante, copiée sur le modèle allemand de la Bundesbank, conduirait à des tensions insupportables dans une Europe faite de nations diverses, aux structures économiques et aux cultures différentes, et aux politiques économiques souvent divergentes.

A ce pari fou sur une convergence économique improbable des nations dans la zone euro, nous avons dès le départ manifesté une opposition solidement argumentée, non pas contre l’Europe mais pour une Europe des peuples avec leurs nations et non pas sans elles, voire contre elles. L’heure des comptes est arrivée. L’arrogance de nos élites bien-pensantes perd déjà de sa superbe.


1. La crise du capitalisme financier est inséparable de la déréglementation néolibérale mise en oeuvre dans le monde anglo-saxon d’abord par Mme Thatcher et M. Reagan, en Europe ensuite en vertu des traités européens et particulièrement de l’Acte Unique de 1987. Au nom de la « concurrence », trois cents directives européennes ont interdit les politiques industrielles et cassé les services publics. La seule régulation admise était celle du capital dont la liberté de mouvement, y compris vis-à-vis des pays tiers, a été consacrée le 1er janvier 1990. Tout le pouvoir aux actionnaires !

Leurs exigences de rentabilité ont fini par commander tous les choix économiques. Les délocalisations industrielles s’ensuivirent. L’épargne française s’est envolée à l’étranger, les capitaux investis à l’extérieur passant de 80 milliards d’euros en 1982 à 880 milliards en 2006, soit onze fois plus. Les effectifs employés dans l’industrie française ont fondu dans le même temps de 6 millions à 3,5 millions. Une quasi stagnation industrielle a marqué les deux dernières décennies, installant notre pays dans un chômage de masse (10 %), frappant particulièrement les jeunes (20 %).

Le capitalisme financier à l’anglo-saxonne est entré, depuis 2007, dans une crise de longue durée. Il a vu son principe se retourner contre lui avec la crise des subprimes. L’Hyperpuissance américaine, qui soutient le capitalisme financier comme la clé de voûte la cathédrale, s’est enlisée militairement et financièrement. Obama solde les comptes de G.W .Bush.

Dès le 4 septembre 2001, je vous avais dit à Vincennes : « Les marchés financiers ne sont pas l’horizon de l’Humanité. Ce sont les nations et les peuples qui font la permanence de l’Histoire ». Nous y sommes. Notre motion d’orientation fait une large place à l’analyse de cette crise que nous avions vu venir depuis longtemps, et en particulier à la situation de l’Europe prise en étau dans les tenailles du G2, ou si vous préférez de la « Chinamérique », je veux dire l’alliance objective des Etats-Unis, dont la monnaie – le dollar – est aussi la monnaie mondiale, et de la Chine qui a bâti sa croissance, tirée par l’exportation, sur l’exploitation par les multinationales d’une immense armée de réserve industrielle dont la qualité est d’ailleurs indéniable.

Le centre de gravité du monde a glissé vers le Pacifique. L’Europe est devenue un continent périphérique. Le traité de Lisbonne a achevé de la réduire à l’impuissance, à travers un mécanisme décisionnel opaque et inopérant. Quel échec tous égards pour les prophètes de Maastricht !

2. La crise de l’euro manifeste la fragilité pour ne pas dire l’absurdité d’une construction européenne fondée sur la négation des nations et de leur irréductible diversité. Les marchés financiers s’en prennent au maillon faible, c’est-à-dire aux Etats de la zone euro, à commencer par ceux qui sont les plus endettés. Il est loin le temps où le général de Gaulle déclarait « la politique de la France ne se fait pas à la corbeille ».

Invité à une émission de télévision, en février 2009, le Président de la République déclarait : « J’observe tous les jours l’évolution de ce qu’on appelle les « spreads », les primes de risque sur un certain nombre de pays. » Monnaie unique ou pas, la pression des marchés financiers recrée, non plus entre les monnaies mais entre les Etats, les tensions que reflétaient autrefois – avant 1999-, les parités monétaires affrontées à la spéculation. Quel désaveu pour cette monnaie unique, dès le départ mal pensée !

L’erreur initiale de la monnaie unique conçue à Maastricht et même avant, dès 1989, a été de faire comme si les nations n’existaient pas. La souveraineté monétaire de chaque pays a été transférée à une instance déconnectée du suffrage universel, la Banque Centrale Européenne indépendante, sans qu’ait été mis en place un gouvernement économique de la zone euro dont le rôle eût été de ne pas laisser se creuser les écarts de compétitivité entre les différents pays et d’ouvrir à tous un sentier de croissance partagé. Le mot « gouvernement économique » semble aujourd’hui accepté, y compris par Mme Merkel mais les interprétations divergent du tout au tout quant à son contenu.

Le Fonds européen de stabilisation financière, mis en place le 9 mai dernier, n’est pas un remède suffisant à la crise de l’euro. J’observe en effet que contre l’avis initial de la France, l’Allemagne a obtenu que chaque pays ne garantisse les futures levées d’argent qu’à hauteur de sa contribution au Fonds.

Le refus de la solidarité financière des Etats pour la mise en œuvre de plans de sauvetage éventuels est une grave faute. Un tel dispositif, en cas de crise grave, favorisera le creusement d’écarts de taux entre les différents pays. Bref, il aggravera la crise ! L’Europe navigue sur un volcan ! Ces Etats peuvent être acculés à la faillite par la pression des marchés. La responsabilité de tous ceux qui ont soutenu le traité de Maastricht et encore hier approuvé le traité de Lisbonne est engagée. « l’autocritique doit être partagée » entre le PS et l’UMP. Pour autant je ne pense pas qu’il faille faire la politique du pire en prenant par avance son parti du défaut possible de tel ou tel pays et de l’éclatement de la zone euro. La monnaie unique est devenue réalité. Elle a coûté beaucoup de sacrifices. Mais elle a eu aussi beaucoup d’inconvénients : un euro trop fort pénalise nos exportations et favorise les délocalisations industrielles. Certes, là où la BCE avait échoué : obtenir une parité un peu plus réaliste, la crise actuelle a provisoirement réussi mais la méthode n’est pas satisfaisante ! Elle est même franchement insuffisante. Nous sommes partisan de défendre la zone euro dans son intégrité mais en changeant les règles du jeu, en introduisant par exemple la croissance et l’emploi parmi les objectifs de la BCE. Le modèle américain, quoi ! Or, un concours de plans de rigueur s’organise dans toute la zone euro sous la pression des marchés financiers et à l’initiative de Mme Merkel. Il est sans doute nécessaire de responsabiliser les Etats. Solidarité de l’Europe et responsabilité des Etats sont deux principes qui doivent aller de pair.

Mais on ne peut raisonnablement demander à la Grèce de réduire son déficit de 13,6 % de son PIB en 2009 à 3 % d’ici à 2013. L’Irlande a de même un déficit de 13,4 %, le Portugal de 9,4 %, l’Espagne de 11,2 %. La purge imposée à ces pays, blocage voire diminution des salaires et des retraites à la clé, n’a aucune chance de réussir en si peu de temps.

En France, les engagements pris – réduire de 100 milliards notre déficit budgétaire d’ici 2013 – risquent de casser la reprise. Il eût fallu distinguer la bonne dette et la mauvaise : la bonne qui prépare l’avenir à travers l’investissement, et la mauvaise qui couvre les frais de fonctionnement et qu’il faut effectivement supprimer. Mais tout cela ne peut se faire sur le dos du monde du travail. Une réforme fiscale de grande ampleur s’impose. On ne peut pas non plus, pour équilibrer nos régimes de retraites mais aussi pour calmer les marchés financiers, remettre en cause la conquête essentielle qu’a été pour la classe ouvrière la retraite à soixante ans. L’espérance de vie pour les ouvriers est de sept ans inférieure à la moyenne. Nous demandons que pour les ouvriers de l’industrie, l’âge de départ à la retraite soit maintenu à soixante ans. Ce sera une bonne manière de revaloriser à la fois le travail et l’industrie.

Joseph Stiglitz l’a dit clairement « Si l’Union européenne continue dans la voie d’un plan coordonné d’austérité, elle court au désastre. Nous savons, depuis la Grande Dépression des années trente, que ce n’est pas ce qu’il faut faire ! ». Le pronostic de Joseph Stiglitz pour la monnaie unique est pessimiste. Je le cite « Pour Athènes, Madrid ou Lisbonne se posera sérieusement la question de savoir s’ils ont intérêt à poursuivre le plan d’austérité imposé par le FMI et par Bruxelles, ou au contraire, à redevenir maîtres de leur politique monétaire. » Le Président de la BCE a déclaré qu’il n’avait pas de plan B. Est-ce prudent ? Je ne le crois pas. Il faut préparer un plan B. Il n’est pas nécessaire de le dire. Mais il faut le faire.

Nicolas Sarkozy a fait malheureusement à Mme Merkel deux concessions majeures en acceptant :

- que le droit de vote d’un pays au sein du Conseil européen puisse être suspendu pour laxisme, en contravention avec les traités existants ;
- que la coordination économique et budgétaire s’opère au niveau de l’Union à vingt-sept, et pas au niveau des seize pays qui ont adopté la monnaie unique où se pose justement ce problème, les onze autres pays qui ont gardé leur monnaie pouvant procéder à des ajustements monétaires.

Même suivisme pour constitutionnaliser l’interdiction du déficit budgétaire. Cette reculade est inquiétante. M. Trichet a proposé un « fédéralisme budgétaire » qui priverait les Parlements nationaux de leur prérogative essentielle : le vote du budget de la nation. Ce n’est pas ainsi qu’on remédiera au déficit démocratique des institutions européennes.

Nous ne saurions accepter l’idée d’un visa préalable de la Commission européenne sur les budgets nationaux. C’est le Parlement qui vote le budget et personne d’autre. Monsieur Trichet sort de son rôle quand il parle de « fédéralisme budgétaire ». Ce discours ne peut avoir qu’un sens : soustraire à la délibération des Parlements l’élaboration des budgets. C’est une remise en cause fondamentale de la démocratie. Parler de fédéralisme relève de l’intoxication.

Celui-ci est impraticable : le budget européen dépasse à peine 1 % du PIB européen. Le taux moyen des prélèvements obligatoires en Europe est d’environ 40 %. Le mot « fédéralisme » dissimule en réalité la volonté de priver les peuples de toute possibilité d’expression et d’influence politique.

Ce qui serait raisonnable ce serait un processus itératif : le Conseil européen approuverait un cadre général de prévisions macroéconomiques, éventuellement ventilé par pays. Il reviendrait aux Parlements nationaux de délibérer et d’établir une programmation, d’ailleurs révisable, des recettes et des dépenses. En cas de désaccord, le Conseil européen chercherait à dégager un compromis, à charge par le gouvernement concerné de le faire ratifier par son Parlement. Il s’agirait donc d’un document de programmation concernant l’évolution de l’économie dans son ensemble aussi bien que celle des Finances publiques. Les parlements continueraient, dans ce cadre, à voter le budget.

Le gouvernement allemand devrait être incité à infléchir sa politique en relâchant la pression qu’il exerce notamment sur l’évolution des normes salariales. Sans doute est-ce là d’abord l’affaire du patronat et des syndicats. Mais dans le passé le gouvernement allemand n’a-t-il pas impulsé des plans comme l’Agenda 2010 ou les différents plans Harz, du nom du conseiller économique de M. Schröder ?

De même, la BCE devrait-elle être encouragée à ouvrir davantage le robinet monétaire, en prenant en pension, en cas de besoin manifeste et comme elle l’a déjà fait occasionnellement pour les titres de l’Etat grec, les titres d’emprunt d’Etat de façon à stopper la spéculation. Il y a là un vrai mécanisme de solidarité européenne défensive. Sur ce sujet, il est important qu’un accord intervienne entre la France et l’Allemagne avant le remplacement de M. Trichet à la tête de la BCE. M. Axel Weber, président de la Bundesbank, s’il est nommé à la place, doit l’être sur la base d’un contrat. La cohésion franco-allemande est sans doute nécessaire, mais elle ne saurait se confondre avec l’alignement !

On ne peut que regretter rétrospectivement le projet de monnaie commune soutenu en 1990 par la Grande-Bretagne, dit encore « hard écu », la monnaie commune ayant cours vers l’extérieur et laissant subsister, à l’intérieur, des monnaies nationales inconvertibles autrement qu’à travers un accord politique fixant leur parité par rapport à la monnaie commune. Ce système simple permettait, sous un « toit européen » commun, les ajustements monétaires rendus nécessaires par les évolutions divergentes que le pacte de stabilité de 1997, rudimentaire et arbitraire, n’a pas permis d’empêcher et qu’on ne pourra jamais empêcher, car ils sont enracinés dans les comportements nationaux façonnés par des siècles d’Histoire.

La situation st aujourd’hui gravissime. Après la Grèce, ce peut être le tour d’un grand pays comme l’Espagne et ensuite le détricotage de toute la zone euro. Nous devons nous préparer à toutes les hypothèses en nous efforçant d’approfondir le dialogue avec l’Allemagne et d’élaborer des positions communes, y compris des scénarios alternatifs.

Nous savons ce que nous ne voulons pas : il ne serait pas réaliste et même franchement contraire à l’intérêt national de vouloir redécouper la zone euro pour en exclure les pays autrefois désignés comme « pays du club Med ». La France ne pourrait pas accepter une union monétaire à cinq ou six avec l’Allemagne et le Benelux. Ce qui reste de notre industrie n’y résisterait pas. Ce serait inacceptable pour l’idée que nous nous faisons de l’Europe. Nous devrons le faire savoir à nos amis allemands. La zone euro doit être défendue dans ses limites actuelles. Il serait inacceptable de revenir à la conception d’un noyau dur à cinq (Allemagne-Benelux-France) tel que proposé en 1994.

Pouvons-nous faire confiance aux milieux dirigeants français, toutes tendances confondues, pour manifester une telle volonté ? Non, nous ne le pouvons pas ! Ils ont trop investi sur l’Europe de Maastricht et sur la monnaie unique. Leur orgueil nourrit leur aveuglement. Nos élites, comme dans les années trente, manquent de confiance en la France. Voilà pourquoi nous devons peser. Ici et maintenant !

II – Notre projet

Notre projet est clairement de refaire de la France un grand pays industriel et technologique. Pour cela nous n’avons aucune confiance dans ceux qui nous ont fourvoyés. Combien d’emplois ont créés en France depuis dix ans les entreprises du CAC40 ? A ma connaissance, aucun. Elles se développent à l’étranger. Nos dirigeants manifestent tous les jours à quel point ils ne croient pas en l’avenir de la France. Et nous, nous voulons rendre confiance à la France et à sa jeunesse. Nous voulons rendre à la France une éthique républicaine exigeante, et avec elle sa fierté et son ambition.

C’est possible ! Nos atouts restent immenses et d’abord dans la formation, la recherche, l’innovation, et ensuite dans notre épargne, l’une des plus élevées du monde ! Ce qui manque c’est la volonté de créer un cadre propice à la valorisation des atouts de la France. Notre mot d’ordre est le même qu’en 1981 : d’abord l’emploi !

Nous disons non à la dictature de l’Argent ! Non à « l’acquisition de la valeur par l’actionnaire », comme disent nos financiers. Nous voulons faire la Révolution. Au sens étymologique du terme : remettre les choses à l’endroit. Faire passer le souci de l’Homme avant celui de la Finance.

Ce n’est pas si difficile que cela :

- Il nous faut d’abord une monnaie qui n’écrase pas notre compétitivité.
- Et nous devons imaginer et mettre en œuvre un contrôle public du crédit, afin de soustraire le développement de nos entreprises à la dictature du court terme et à la myopie de nos élites financières.

Voilà le projet de salut public qui éclaire nos quarante propositions.

Nous voulons une autre Europe, fondée sur la démocratie qui vit dans les nations. Nous voulons une ligue de peuples étendue jusqu’à la Russie. Nous devons organiser la « résilience » de l’Europe. Certes, les temps où l’Europe dominait le monde sont définitivement derrière nous. Nous nous réjouissons du développement légitime de grands pays milliardaires en hommes. Mais pas au prix de la destruction de notre industrie, de notre modèle social et de notre avenir !

Je suis persuadé qu’un projet commun peut réunir Paris et Berlin vers la Russie d’une part, vers la Méditerranée et l’Afrique d’autre part. Et ce projet européen peut associer Rome, Madrid, Varsovie, et d’ailleurs toutes les autres capitales européennes. C’est de la « résilience » de l’Europe qu’il s’agit, bref de la survie d’un ensemble de nations libres, démocratiques et que nous voulons maintenir prospères. Oui le moment approche où il faudra repenser ce que le mot « Europe » veut dire !

Il faut faire bouger les lignes. Que le vrai débat s’ouvre. Nos élites ne comprennent qu’un langage : celui des rapports de forces. Nous sommes seuls ? Mais ouvrons les yeux : en Europe, les peuples n’acceptent pas la purge. Les Etats-Unis d’Obama non plus, qui ont besoin d’une locomotive européenne pour les aider à combler leurs déficits.

Regardons le calendrier : après 2012 en France, il y a en Allemagne 2013, l’échéance des élections générales ! Or, la gauche allemande reprend du poil de la bête, même si ses divisions entre le SPD, die Linke et les Verts constituent pour elle un handicap historique. Une France progressiste pourrait l’aider à surmonter ce handicap. Parions que de toute façon les évènements feront bouger les mentalités chez notre grand voisin. À condition que la France se tienne et qu’elle joue son rôle, celui de la nation forte qu’elle a été et qu’elle doit redevenir !

Je ne m’étends pas davantage sur notre projet : Il est de rendre la France exemplaire !

III – Comment peser ?

1. Comment d’abord mettre la France à la hauteur des formidables défis qui sont devant nous ?

Je ne dirai que peu de mots de Nicolas Sarkozy. Sa fonction n’est pas en cause. Il a été élu démocratiquement Président de la République. Mais c’est son projet, libéral, européiste et atlantiste que nous combattons. Il ne met pas la France sur la bonne pente. Nicolas Sarkozy peut être battu, mais il n’y a pas aujourd’hui d’alternative politiquement et intellectuellement construite : Le Parti socialiste reste prisonnier d’une vision libérale et européiste dépassée. Comme hier avec les Verts, au sein de la « gauche plurielle », l’alliance avec Europe Ecologie pose problème. Certes, sur divers sujets de société ou même de politique extérieure, et sur les questions environnementales, nous pouvons trouver des convergences ou des compromis avec cette formation, mais sa thématique (décroissance, sortie du nucléaire, rejet de la philosophie des Lumières, au nom de la contestation du « progrès »), tourne trop souvent le dos aux orientations d’une politique de salut public.

Comment, dans ces conditions, substituer une régulation politique à la dictature des marchés financiers, sinon en se tournant vers le peuple lui-même ? C’est tout simplement notre devoir, car il faut que notre peuple soit à nouveau rendu maître de son avenir.

2. Nous devons donc remédier à l’insuffisance de l’offre politique.

Non que les hommes ou les femmes qui prétendent à concourir soient médiocres.

Nicolas Sarkozy a des défauts, mais il a aussi d’incontestables qualités, d’habileté et de pragmatisme. Cela ne suffit pas. Dominique de Villepin a beaucoup de qualités, mais il a aussi quelques défauts, par exemple d’avoir gardé sa carte à l’UMP.

Pouvons-nous nous tourner en confiance vers le PS ? Martine Aubry est une femme énergique. Elle donne le sentiment de savoir où elle va mais si son projet rencontrait le nôtre, elle ne nous marcherait pas sur les pieds tous les jours.

Je ne reviendrai pas sur les régionales où neuf de nos candidats, placés en position éligible et inamovible, aux termes mêmes de l’accord dûment paraphé par Martine et par moi-même, ont été purement et simplement éjectés entre les deux tours.

Je ne dirai rien sur les élections européennes où les conversations engagées ont tourné court, du fait du PS.

Je ne dirai rien sur les municipales où quand nous sommes en position forte, comme à Belfort, nous devons affronter une liste socialiste au premier tour. Encore, avec 13 % se désiste-t-elle au second tour pour la liste conduite par Etienne Butzbach qui l’avait nettement devancée au premier avec 33 % des voix.

Rien de tel aux sénatoriales, où le Président du Conseil général socialiste se maintient contre moi au deuxième tour bien que je l’aie devancé au premier. Cela ne m’a d’ailleurs pas empêché d’être élu contre le candidat de l’UMP, ce qui est normal, et contre celui du PS, ce qui ne l’est pas du tout.

Bref, le Parti socialiste ne nous tolère que lorsque cela lui est utile ou qu’il y est contraint. Autrement, il nous écrase. Il ne reconnaît pas la légitimité du débat qui nous oppose à lui sur maints sujets. Il est incapable d’une autocritique sérieuse, sur Maastricht par exemple ou sur 2002 où il nous transforme en bouc émissaire commode pour ne pas avoir à remettre en cause la ligne politique qui l’a conduit à la défaite. Il délaisse le social pour le sociétal et au point où il est parvenu, il transformerait volontiers la gauche en organisation caritative.

Dominique Strauss-Kahn, a de remarquables facilités intellectuelles. Comme Martine Aubry, je le connais bien. Nous avons eu longtemps des relations sympathiques. Sauf sur la politique industrielle, sur l’Europe dont, dans un rapport remis à Romano Prodi en 2004, il voulait faire une nation, thèse peu sérieuse pour un candidat potentiel à la Présidence de la République française, sauf enfin sur les plans de rigueur qu’il administre à la tête du FMI. Au sein de celui-ci, les Etats-Unis disposent d’une minorité de blocage. Etait-il si prudent de les introduire dans la bergerie européenne ? Et de mettre d’éventuels plans de sauvetage de l’euro sous tutelle américaine ?

Ségolène Royal est courageuse. Sa personnalité est charismatique. Elle n’a malheureusement pas respecté jusqu’au bout l’accord politique qui la liait à nous.

François Hollande est talentueux. C’est le meilleur orateur chez les socialistes. J’ajoute, à titre personnel, qu’il est très sympathique. Mais sur l’essentiel, ces quatre-là pensent la même chose. Ce sont des sociaux-libéraux. Ils ne voient rien, au-delà de l’horizon des marchés financiers. C’est embêtant.

Je ne dirai rien du Parti communiste et du Parti de gauche. Il faut d’abord qu’ils s’entendent sur la procédure.

3. Nous avions un moment envisagé, avec circonspection mais esprit d’ouverture, des primaires de toute la gauche. Elles n’auraient été possibles que sur la base d’un dessein à peu près partagé. Sinon le désistement n’aurait eu que le sens d’un ralliement. En sommes-nous là aujourd’hui ? Certainement pas. Il faut donc faire bouger les lignes !

Par ailleurs, il faudrait bien sûr un accord sur l’organisation de ces primaires. Mais les dirigeants du PS n’ont-ils pas commencé à vider eux-mêmes ces « primaires » de leur substance en passant par avance des pactes de désistement ? Pacte de Marrakech entre Dominique Strauss Kahn et Martine Aubry … Pacte du Boulevard Raspail où se sont rencontrées Ségolène Royal et Martine Aubry … François Hollande lui-même exprime sa crainte de passer pour un « diviseur » s’il se présente à ces primaires ! Bonjour l’ambiance !

Bref, les choses de ce côté là ne sont pas mûres … Il faudrait que sur tous les sujets de fond s’engage un débat fracassant ! Sinon ces primaires risquent de se résumer à une campagne médiatique arbitrée par les sondages.

Pouvons-nous changer la donne ?

4. Devant tant d’incertitudes, nous devons prendre nos résolutions. Pour faire bouger les lignes et engager un débat sur le fond, le MRC doit se préparer à présenter un candidat républicain – je cite notre motion d’orientation. C’est la seule manière de faire que 2012 soit le début de la reconquête par la France de son destin.

La tâche est infiniment rude car la gravité de la situation financière va très vite mettre le salut public à l’ordre du jour. Ce n’est pas seulement une candidature républicaine qui fera bouger les lignes. Ce seront les évènements eux-mêmes. Pour préparer l’avenir d’une Europe des peuples, avec en son cœur une compréhension franco-allemande renforcée, il faut une France forte et une France capable de raisonner mondial. La crise du capitalisme financier mondialisé implique en effet une réponse mondiale. Notre meilleur allié aujourd’hui s’appelle Obama. Car le Président américain doit résorber les énormes déficits de la balance commerciale (700 milliards de dollars) et du budget général américain (12 % du PIB !).

Il ne le peut qu’à travers une croissance forte, non seulement aux Etats-Unis mais dans le reste du monde. Il doit pouvoir compter sur une France capable de jouer son rôle de contrepoids en Europe, dans l’intérêt de l’Europe et de l’Allemagne elle-même. Car celle-ci réalise 60 % de son excédent commercial sur la zone euro. L’Allemagne aussi a ses problèmes. Elle connaît notamment une précarité grandissante. Une relance de la demande intérieure, y compris par la voie salariale, peut ranimer la croissance allemande. Bref un compromis européen est nécessaire à tous égards, y compris pour aider les Etats-Unis à surmonter leur crise.

Voilà le discours que devrait tenir un candidat républicain, animé d’une vision qui réponde à l’intérêt national mais plus largement encore à l’intérêt de l’Humanité tout entière dans cette période historique dangereuse où la guerre peut, comme dans toutes les périodes de crise, à tout moment, surgir à l’horizon.

5. Qui peut nous inspirer confiance dans ces circonstances difficiles ? Objectivement, il n’y a pas beaucoup d’hommes d’Etat à l’horizon. Certes on ne naît pas homme d’Etat. On le devient. Je suggère que nous ne prenions pas aujourd’hui de décision précipitée sur la personne du candidat républicain dont la France a besoin et que nous soutiendrons. Un candidat à la Présidence de la République peut être soutenu par un parti. Mais il ne peut être le candidat d’un parti. Pour ma part, vous le savez, je n’ai jamais été tenaillé depuis l’adolescence par l’envie rentrée de devenir Président de la République. Je n’ai pas calibré ma carrière en conséquence.

Je me suis borné à une fonction d’instituteur républicain, en quelque sorte, au sens étymologique du terme. Si je me suis résolu à être candidat en 2002, c’est pour témoigner d’une vision républicaine qui n’était portée par aucun autre. Je ne retire rien des vues que j’ai exprimées qui n’avaient en général que le défaut d’être prémonitoires. Sur l’Europe par exemple.

Je récuse évidemment le procès imbécile qui m’a été fait d’avoir fait perdre le candidat socialiste. Si 11 % des ouvriers seulement ont voté pour lui, ce n’est quand même pas la faute de Chevènement. Trêve donc de balivernes ! En démocratie il est légitime de porter le débat devant l’électeur.

Aujourd’hui, je ne veux rien exclure. Certes, je ne suis plus jeune. Mais l’expérience est irremplaçable. Depuis quarante ans, depuis le Congrès d’Epinay, j’ai vu qui était qui, qui faisait quoi. J’ai compris beaucoup de choses. Et je ne suis animé que par le souci de servir mon pays. J’observe qu’en 1917, Clemenceau avait soixante-dix-sept ans. Quelle leçon d’énergie il a laissée ! Celle-ci serait aujourd’hui bien nécessaire !

6. Quel profil d’ailleurs doit avoir un Président de la République par les temps qui courent ?

La hauteur de vues, c’est le principal.
La volonté ensuite de rétablir dans l’Etat une stricte déontologie républicaine.
Le souci enfin d’aller à l’essentiel, en laissant le Premier ministre gouverner et recevoir, par exemple, Thierry Henry.

Bref, du grand classique ! En outre, le souci de rassembler largement, sans sectarisme et sans démagogie, car le Président de la République doit être « l’Homme de la Nation » et pas celui d’un parti. C’est ce qui est embêtant aujourd’hui : les institutions de la Vème République n’étaient pas faites pour être ainsi confisquées par deux partis. Il faudrait donner un peu d’air à tout cela ! Voilà pour le profil du candidat.

7. Le moment est-il venu de décider ? Chacun comprendra qu’il faut créer d’abord un espace politique. C’est là votre mission. Pour ma part, je porterai dans le pays le message de la République à chaque occasion

Comment créer cet espace politique ? Je ne vois qu’un moyen : convaincre nos concitoyens que ceux qui les ont fourvoyés depuis Maastricht, et même avant et jusqu’à Lisbonne en 2008, ne sont pas les mieux placés pour solliciter leur confiance. Faites donc entendre le langage de la vérité ! Vous le connaissez ! Faites connaître nos analyses et notre projet. Sachez que pour ma part, je suis disponible ! Alors, vous verrez, d’ici un an, vous ferez bouger les lignes. C’est ainsi que vous ferez revivre la République, que vous aiderez au grand retour de la France et que vous ouvrirez non pas un misérable futur, mais un bel avenir à notre jeunesse.

Le MRC pour un « candidat républicain » en 2012, Chevènement en première ligne

Créé par le 27 juin 2010 | Dans : Blog du Che, Fédérations MRC d'Aquitaine

Le Mouvement républicain et citoyen (MRC) qui a élu Jean-Luc Laurent comme nouveau président lors son 5e congrès, a décidé dimanche de soutenir un « candidat républicain » pour la présidentielle 2012 qui pourrait bien être Jean-Pierre Chevènement, désormais président d’honneur.

Le Mouvement républicain et citoyen (MRC), regrettant la tournure qu’ont prise les primaires, a décidé de soutenir un « candidat républicain » pour la présidentielle de 2012 qui pourrait bien être Jean-Pierre Chevènement, désormais président d’honneur du parti.

Lors du 5e congrès du MRC ce week-end à Paris, à l’Auditorium George V (VIIIe arr.), les quelque 200 délégués ont voté à la quasi-unanimité pour « se préparer à présenter un candidat républicain » à cette « élection primordiale, la mère des batailles », selon les mots de l’ancien ministre de la Défense et de l’Intérieur.

« Nous avions répondu oui aux primaires de toute la gauche dès lors qu’un contenu politique précédait les primaires proprement dites », a expliqué à la tribune Jean-Luc Laurent élu, à 53 ans, nouveau président du MRC à 91,7%. Un « score pas tout à fait biélorusse », s’est amusé son prédécesseur, M. Chevènement, élu, lui, à 71 ans et à l’unanimité, président d’honneur.

Mais il n’est pas question de « participer aux primaires dans les conditions définies par le PS, entraînant inéluctablement notre ralliement automatique au candidat socialiste sans connaissance ni discussion du projet », a ajouté M. Laurent, maire du Kremlin-Bicêtre (Val-de-Marne).

Dénonçant un PS qui « nous écrase » et « reste prisonnier d’une vision libérale et européiste dépassée », M. Chevènement a estimé, devant le secrétaire national PS aux élections Christophe Borgel, que ces primaires risquaient de « se résumer à une campagne médiatique arbitrée par les sondages » après le « pacte » Martine Aubry, Dominique Strauss-Kahn, Ségolène Royal.

Face à la crise du capitalisme financier et « la crise de la monnaie unique que nous avions prévue depuis sa création », le MRC propose donc un « programme de salut public » en 40 propositions. « Nous voulons faire la révolution », c’est-à-dire « remettre les choses à l’endroit » et « faire passer le souci de l’Homme avant celui de la finance », a lancé « le Che » comme l’appellent certains délégués, se prononçant notamment pour « une monnaie qui n’écrase pas notre compétitivité » et une « mise en oeuvre d’un contrôle public du crédit ».

Dans un parti qui reproche au PS d’avoir renié les accords électoraux aux régionales (19 élus obtenus au lieu de 26 prévus), la candidature de M. Chevènement qui doit rencontrer Martine Aubry en juillet, semble donc se profiler. « Son expérience, sa stature d’homme d’Etat, sa probité lui permettent de se mettre en situation et de préparer cet objectif, non pas pour le MRC mais pour la France », a affirmé M. Laurent, très applaudi.

En devenant président d’honneur, M. Chevènement qui avait obtenu 5,3% des voix en 2002 et soutenu Ségolène Royal en 2007, se rend « disponible le cas échéant » pour 2012, selon Julien Landfried, secrétaire national MRC à la communication qui a déjà réservé les noms de domaine « www.chevenement2012.fr » et « www.chevenement2012.com ».

Avant d’entonner la Marseillaise à la fin de son discours, l’intéressé, lui, a assuré ne « rien exclure », n’étant « animé que par le souci de servir (s)on pays ». « Certes je ne suis plus jeune, mais l’expérience est irremplaçable », a dit l’ex-ministre de Lionel Jospin, récusant « le procès ridicule qui (lui) a été fait d’avoir fait perdre le candidat socialiste » en 2002.

Mais une autre ambition pourrait changer la donne. Selon un proche du sénateur de Belfort, « M. Chevènement pourrait être un bon candidat à la présidence du Sénat » en cas de basculement à gauche aux sénatoriales de 2011, car il est « respecté à droite et apparaîtrait comme une candidature d’équilibre ».

Entretien au Parisien / Aujourd’hui en France : Chevènement : «Pour 2012, je n’exclus rien»

Créé par le 26 juin 2010 | Dans : Blog du Che, Fédérations MRC d'Aquitaine

Entretien de Jean-Pierre Chevènement au Parisien / Aujourd’hui en France, samedi 26 juin 2010.


Entretien au Parisien / Aujourd'hui en France : Chevènement : «Pour   2012, je n'exclus rien»

A nouveau en froid avec le PS, Jean-Pierre Chevènement pourrait être candidat à l’élection présidentielle en 2012.

Quel est le principal enjeu du congrès de votre mouvement ce week-end ?
Nous allons actualiser notre ligne politique dans la perspective de la présidentielle. Notre souci est de faire bouger les lignes pour faire apparaître les véritables problèmes : la crise du capitalisme financier et celle de l’euro mettent l’Europe et la France en position d’extrème faiblesse face aux Etats-Unis et à la Chine. Dans ces conditions, comment rendre un avenir à notre pays ? C’est la question principale.

Votre candidature à la présidentielle de 2012 est-elle possible?
Je ne veux rien exclure. Un candidat républicain doit s’affirmer pour mettre la France à la hauteur des défis qu’elle a à relever. La ligne sociale-libérale suivie par le PS ne correspond pas à la situation actuelle. Le PS reste prisonnier d’une vision de l’Europe dépassée. La monnaie unique était un échec prévisible depuis Maastricht. Le concours de plans de rigueur mis en œuvre simultanément dans toute l’Europe est insupportable pour les peuples.

Le directeur du FMI Dominique Strauss-Kahn pourrait-il être le candidat de la gauche?
Dominique Strauss-Kahn et Martine Aubry ont soutenu depuis l8 ans la politique conçue à Maastricht. Ils se sont gravement trompés. Doit-on confier à ceux qui se sont fourvoyés le soin de proposer des remèdes?


 

En 2007 vous disiez être favorable à des primaires de la gauche…
Mais le PS lui-même a contribué à vider les primaires de leur signification ! Nous avons le pacte de Marrakech qui lie Martine Aubry et Dominique Strauss-Khan. Et voilà maintenant le pacte du boulevard Raspail qui les unit tous deux à Ségolène Royal. Qui arbitrera ? Les sondages ! Ce n’est pas notre conception du débat. D’autant que, pour l’instant, nous ne partageons pas un projet commun.

En quoi feriez-vous la différence ?
Nous aurions l’énergie républicaine de défendre les intérêts de la France en proie à la désindustrialisation et au chômage. Nous ne laisserions pas, par exemple, notre pays confiné dans une petite zone euro avec une monnaie tellement forte qu’elle ferait disparaitre ce qui nous reste d’industrie.

Travaillez-vous en confiance aujourd’hui avec le PS ?
Le PS a manqué aux engagements pris à notre égard. C’est ce qui s’est passé lors des élections régionales. Alors chat échaudé craint l’eau froide…

Vous aurez 73 ans en 2012…
Il faut de l’expérience pour affronter la tempête. Et je n’aperçois pas pour le moment de grandes capacités d’hommes d’Etat à l’horizon.

Entretien au Journal du dimanche : Chevènement: « Rompre avec la dictature de l’argent »

Créé par le 26 juin 2010 | Dans : Blog du Che, Fédérations MRC d'Aquitaine

Entretien de Jean-Pierre Chevènement au Journal du dimanche, samedi 26 juin 2010.


A la veille du congrès national du MRC (Mouvement républicain et citoyen), son président, Jean-Pierre Chevènement, en détaille les enjeux au JDD.fr. Pourfendeur de la « dictature de l’argent », l’ancien ministre de l’Intérieur veut replacer l’emploi au centre des priorités politiques. En rupture avec la logique « sociale-libérale » du PS, le « Che » confirme également la présence d’un candidat « républicain » à l’élection présidentielle de 2012.

Le Mouvement républicain et citoyen (MRC) que vous présidez tient congrès ce week-end. Quels en sont les enjeux?
Jean-Pierre Chevènement :

Notre congrès se situe clairement dans la perspective de l’élection présidentielle de 2012. Nous voulons faire bouger les lignes, c’est-à-dire nous emparer des problèmes de fond: le capitalisme financier est en crise, la monnaie unique européenne est un échec évident. Et nous ne pouvons pas demander à ceux qui nous ont fourvoyés de nous offrir des remèdes.

Qui visez-vous?
Je vise tous ceux qui, solidairement et depuis des années, ont porté le projet de monnaie unique. Or, c’était un pari fou de transférer la souveraineté monétaire sans tenir compte de l’irréductible diversité des nations européennes.

Ce week-end vous présenterez un « programme de salut public ». Quel en est l’esprit?
Nous faisons d’abord une analyse de l’Europe face à ce que l’on appelle la « Chinamérique ». Nous voulons une autre Europe, une Europe des peuples, avec les nations – et non contre elles – une grande Europe allant jusqu’à la Russie et ouverte sur la Méditerranée et sur l’Afrique. Nous voulons aussi rassembler les Français autour d’un projet pour le pays, axé autour d’un nouveau modèle de développement. L’enjeu majeur est de ne pas laisser la France enfermée dans une zone euro réduite à quelques pays, avec une monnaie à ce point surévaluée qu’elle entraînerait la fin de l’industrie nationale. Il faut enfin cesser d’emboîter systématiquement le pas de Mme Merkel, qui impose aujourd’hui à l’Europe un concours de plans de rigueur massifs et simultanés. La catastrophe sociale est au bout.


Au niveau national, vous avez qualifié de « simulacre » le projet de primaires adopté par le Parti socialiste. Pourquoi?
Parce qu’il pose un double problème. De contenu, d’abord, puisque le Parti socialiste reste prisonnier d’une ligne « sociale-libérale » et d’une conception dépassée de l’Europe. Sur l’organisation de ces primaires, ensuite, ce que l’on appelle le « pacte de Marrakech » entre Martine Aubry et Dominique Strauss-Khan, auquel s’ajoute son corollaire, « le pacte de Raspail », qui inclut Ségolène Royal, vide le projet de sa substance. Nous allons tout droit vers une compétition médiatique, arbitrée par les sondages. Dans ces conditions, il s’agit effectivement d’un simulacre de démocratie.

Comme le PRG (Parti radical de gauche), vous avez l’intention de présenter votre candidat à l’élection présidentielle de 2012? Pourquoi?
D’abord, je tiens à préciser que le candidat républicain que nous soutiendrons ne sera pas forcément issu des rangs du MRC. Ensuite, la volonté de peser sur l’élection présidentielle de 2012 tient surtout à des raisons de fond. Il nous faut faire bouger les lignes, c’est fondamental. Nous vivons aujourd’hui sous la dictature de l’argent. Ce sont notamment ces taux de rentabilité extravagants réclamés aux entreprises, lesquelles ne peuvent satisfaire ces exigences et délocalisent l’emploi. Depuis le début des années 1980, nous avons perdu près de la moitié de nos emplois industriels. Il faut rompre avec cette dictature. Notre programme est de rendre confiance à la France, à sa jeunesse. Il s’agit de remettre l’exigence de l’emploi au premier plan et de refaire de la France un grand pays industriel et technologique.

Serez-vous ce candidat?
Je ne veux rien exclure aujourd’hui, mais il faut que les conditions nécessaires soient réunies, à commencer par l’existence d’un espace politique pour notre projet. Mais il faut pour cela que le débat politique de fond puisse être ouvert. Nous devons nous adresser au pays pour que les citoyens prennent conscience qu’un certain nombre de choix qui ont été faits dans le passé conduisent à la situation désastreuse de la France aujourd’hui. Il est temps de remettre la France sur la bonne voie, de lui rendre son avenir et de restaurer une éthique républicaine.

Une candidature de votre parti rappelle 2002 et la défaite au premier tour de Lionel Jospin. Ne pensez-vous pas faire courir un danger à la gauche?
Il ne faut pas être dupe de ces campagnes de défausse. Si Lionel Jospin n’a obtenu que 11% des voix chez les ouvriers en 2002, ça n’est pas la faute de Chevènement! J’ai défendu légitimement des orientations politiques différentes des siennes. Et depuis 2002, ma ligne politique n’a pas varié: sur l’école, la sécurité, l’Europe, la politique étrangère ou la République et la laïcité, mon discours est dicté par ce que je crois être l’intérêt de la France.
« Je me suis toujours battu dans l’intérêt de notre pays »

La semaine dernière, à l’occasion du 70e anniversaire de l’appel du 18-Juin, des sondages vous plaçaient, avec d’autres personnalités, dans la lignée politique du général de Gaulle. Quel sentiment en retirez-vous?
De la fierté. Je me suis toujours battu dans l’intérêt de notre pays et je pense que les Français le savent. Tous les choix que j’ai pu proposer pour notre pays, qui, à l’époque n’étaient pas majoritaires, apparaissent être aujourd’hui raisonnables: mon opposition à l’installation du capitalisme financier, à la première guerre en Irak ou à la déconstruction de la République. Celle-ci aboutit aujourd’hui par exemple, au triste spectacle offert par l’équipe de France de football en Afrique du Sud.

Selon vous, l’échec des Bleus participe à « la déconstruction de la République »?
Cet échec est le reflet, certes grossissant, des maux qui, malheureusement, rongent notre société actuelle: la puissance de l’argent, les inégalités, la grossièreté et l’absence de cohésion…

La semaine dernière toujours, Dominique de Villepin a lancé son mouvement, ouvertement gaulliste. Pourriez-vous vous reconnaître dans cette démarche?
Il y a des tonalités tout à fait sympathiques dans son discours, notamment en ce qui concerne la politique étrangère. En revanche, il ne propose pas un projet qui soit en rupture avec le capitalisme financier et avec ce que j’appelle « l’européisme », cette conception qui oublie que l’Europe est d’abord composée de nations. D’ailleurs, Dominique de Villepin conserve sa carte à l’UMP. Sa démarche sans doute tactique, stratégique. Il faut lui laisser le temps d’évoluer.

Votre nom circule pour réchauffer les relations franco-algériennes. Vous confirmez?
Je dois effectivement me rendre en Algérie pour deux conférences au mois de septembre prochain. Quand j’étais ministre de l’Intérieur, j’avais contribué à réchauffer les relations franco-algériennes (de 1997 à 2000, ndlr). J’avais pu notamment rencontrer le président Bouteflika, que je connais d’ailleurs depuis très longtemps – depuis 1962 très exactement, quand il était ministre de Ben Bella. Maintenant, mon déplacement en Algérie, par le biais d’institutions culturelles, s’effectuera à titre privé. A Alger, et peut-être à Oran, je rencontrerai des gens que je connais bien. Je suis attaché à l’amitié franco-algérienne, mais je ne suis porteur d’aucune mission officielle.

Psychiatrie : un projet de loi inacceptable

Créé par le 17 juin 2010 | Dans : Gouvernement, Santé-social-logement

Communiqué de presse commun à propos du « projet de loi relatif aux droits et à la protection  des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques et à leurs modalités de prise en charge » 

Notre prise de position se situe à lenvers du projet gouvernemental ici dénoncé. Nous pensons qu’il faut un processus dévolution de la psychiatrie quand elle semploie à défendre et accroître la justice sociale dans le soin, quand elle cherche à augmenter les possibilités de liberté dans chaque situation de soin, quand elle considère toujours tout être humain en souffrance psychique en qualité de sujet, de personne et de citoyen, pris dans un environnement social et existentiel, quand elle garantit un accompagnement des professionnels garants de ce qui précède. Quels que soient les atours dont la ministre de la Santé veut lhabiller, le projet actuel est à lopposé dune telle orientation. Il ne fait quappliquer les discours sécuritaires du président de la République dans ce domaine.

Nous sommes plus que jamais dans lordre gestionnaire et administratif, où le préventif nest que prédictif, où le soin nest que contrainte, où la « personne présentant des troubles mentaux » nest que dangerosité à neutraliser. Toutes les mesures prises depuis décembre 2008 le confirment. Dans ce contexte, comment comprendre autrement la rétention de 72 heures que comme une « garde à vue «  psychiatrique, et les développements des « soins sans consentement » comme participant de la société de surveillance et du nouveau management scientiste promouvant lhomme économique.

Cela ne peut avoir échappé aux organisations professionnelles et aux associations dusagers et des familles, dont la ministre de la Santé affiche à longueur dinterviews avoir leur accord. Or, au climat dinsécurité nourri par toute occurrence tant auprès de la population que des professionnels, sadjoint un évident risque deffet opposé, soit une plus forte soustraction, voire une violente opposition, au soin psychiatrique.

Nous ne pouvons donc cautionner de telles « innovations » en trompe-lœil ! A la place dune attribution de dangerosité, à la place de la violence du soin intrusif et contraint, cest bien dune disponibilité et dune obligation à soigner dont il doit être question dans les attributions effectives de la psychiatrie, ainsi que dun engagement de lÉtat. A lextensivité du soin sans consentement (qui pourrait sétendre jusquà la collocation à domicile et lemploi de la géolocalisation), il est possible dopposer une psychiatrie de proximité, daccueil, découte, respectueuse de la personne, de sa parole, de sa dignité, de sa vie privée comme publique, capable de prendre en compte pleinement besoins et état de nécessité, la personne et son environnement.

Les organisations signataires déclarent quelles appellent les parlementaires à rejeter le« projet de loi relatif aux droits et à la protection des personnes faisant lobjet de soins psychiatriques et à leurs modalités de prise en charge », et quelles organiseront un débat public citoyen pour sy opposer. Elles se déclarent prêtes à œuvrer pour le développement dune politique du soin psychique respectueuse de la personne et de ses droits fondamentaux, mais aussi attentive aux demandes de son environnement. A ce titre, elles affirment quil sagit de supprimer mesure de sûreté et loi de police actuelles (sous lautorité du préfet), pour une loi basée sur la protection de la personne. Cest dire que toute mesure de contrainte, tout soin sans consentement relève de lautorisation préalable dun juge judiciaire et de son contrôle ensuite. Les organisations signataires en feront un thème démocratique fort.

Paris, le 16 juin 2010  Premiers signataires : 

Advocacy France, CAUPsy, collectif Non à la politique de la peur, Fédération pour une alternative sociale et écologique (Fase), Groupe information asiles (GIA), Ligue des droits de lHomme, Parti communiste français, Parti de gauche, Solidaires, Sud santé sociaux, Union syndicale de la psychiatrie, les Verts…

12

Nouveau regard, nouvelle Ec... |
democratia |
Mers El-Kébir Franc-Tireur |
Unblog.fr | Annuaire | Signaler un abus | Les emprunts russes
| mouvement de soutien "waaxu...
| HYPERDEMOCRACY