L’économiste, ex-présidente de la convention citoyenne pour le climat et ancienne ambassadrice pour les négociations de la COP21 à Paris en 2015, est la « personnalité de la société civile » qui a été proposée, lundi 15 juillet (1), par le Parti socialiste (PS), le Parti communiste français (PCF) et Les Ecologistes à La France insoumise (LFI). Après l’épisode de refus par le PS de la présidente de région de La réunion, la présente candidature souffre d’un rejet de la part des Insoumis qui voient en elle une candidate Macron compatible.

Récemment signataire d’une tribune au « Monde », Laurence Tubiana fait partie d’un collectif  de 70 intellectuels, responsables associatifs et anciens élus de gauche. Celui-ci plaide pour tendre la main aux autres acteurs du Front républicain pour discuter d’un programme d’urgence républicaine. Selon ce collectif l’initiative doit partir du côté du NFP et du programme présenté aux législatives qui ne peut pas être un point d’arrivée dans tous les domaines (2).

Une analyse que l’on retrouve aussi chez l’historien Matthieu Fulla. Lequel situe la spécificité et les difficultés de la position du NFP par rapport aux références historiques permettant à la gauche d’exercer le pouvoir ; cartel des gauches en 1924-1926, Front Populaire 1936-1937, Libération et début de la quatrième République, 1944-1947, Union de la Gauche, 1981-1984 et gauche plurielle, 1997-2002, avec participation communiste au gouvernement, 1984 -1986, 1988-1993, présidence Hollande, 2012-2017, sans participation communiste. Par comparaison avec les précédentes victoires électorales de la gauche aux législatives, le NFP se trouve, écrit-il, dans une configuration sociopolitique et institutionnelle inédite. Avec la présence massive de l’extrême droite sur les bancs du Palais-Bourbon et l’existence d’un Hémicycle composé de blocs rivaux, situation sans précédent dans l’histoire de la Ve République. 

Au pouvoir, la gauche a toujours dominé l’Assemblée à l’ exception du gouvernement de Michel Rocard (1988-1991), contraint de solliciter l’appui d’une quinzaine de députés communistes ou centristes pour faire voter ses lois. Différence notable car le NFP au pouvoir devra convaincre systématiquement une centaine d’élus d’autres bords.

Cet historien, spécialiste de l’histoire des gauches en Europe, a fait sa thèse sur « le parti socialiste face à la question économique (1945-1981), une histoire économique du politique ». On lit donc avec intérêt ses considérations sur les difficultés de la situation présente avec cette droitisation de la société. La chute de son article ne manque pas de piquant quand il convoque les écrits antérieurs d’Emmanuel Macron en 2011 dans la revue Esprit.

« Prônant la remise à plat d’un régime phagocyté par l’élection présidentielle, son auteur, un certain Emmanuel Macron, y lançait un éloge vibrant de la « double vertu du parlementarisme et de la démocratie sociale que notre République a encore trop souvent tendance à négliger ». Cette approche, aux antipodes de la pratique « jupitérienne » du pouvoir, aurait pu esquisser une voie de sortie négociée de cette situation inédite. En fixant par le haut les conditions de création de la nouvelle majorité dans sa deuxième « lettre aux Français » en moins d’un mois, le chef de l’Etat a au contraire privilégié la confrontation avec la gauche.(3) »

Xavier Dumoulin

(1)lemonde.fr/politique/article/2024/07/16/la-candidature-de-laurence-tubiana-pour-matignon-soumise-a-lfi-le-nouveau-front-populaire-au-bord-de-la-rupture

(2)lemonde.fr/idees/article/2024/07/11/le-nouveau-front-populaire-doit-sans-tarder-tendre-la-main-aux-autres-acteurs-du-front-republicain-pour-discuter-d-un-programme-d-urgence-republicaine

(3)lemonde.fr/idees/article/2024/07/15/mathieu-fulla-historien-le-nfp-se-trouve-dans-une-configuration-inedite-dans-l-histoire-des-victoires-electorales-de-la-gauche