Ségolène Royal
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Créé par sr07 le 15 nov 2008 | Dans : Parti socialiste, Ségolène Royal
Elle a un mérite, parmi beaucoup d’autres assurément, c’est de ne pas se contrefaire. A la question de savoir si elle se portait candidate au poste de premier secrétaire du PS, elle a répondu, mercredi, sur TF1 : « C’est vrai que j’en ai envie. » Tout Ségolène Royal était dans cette phrase. Là où une autre – un autre – aurait parlé de « conditions réunies », de « situation objective » ou d‘ »amicales pressions », elle a déclaré franchement son désir d’exercer cette fonction. Simplicité rafraîchissante, se réjouissent les uns ; attention toujours ramenée à soi, s’irritent les autres.
La question avait été posée dans les formes canoniques : un congrès, un poste à pourvoir, une candidature à déclarer. La réponse a ignoré les usages, rusé avec les règles, affirmé une subjectivité qui reléguait dans l’ombre statuts, procédures et calculs. L’aveu de « l’envie » fut suivi immédiatement de la prise à témoin de l’opinion, dont le truchement permettait à l’interviewée de quasiment parler d’elle-même à la troisième personne, pour observer qu’elle a la réputation de ne pas être « une femme d’appareil ».
Cette femme, à laquelle le miroir de l’opinion dit qu’elle n’est pas une femme d’appareil – préservant ainsi sa différence par rapport au parti qu’elle souhaite diriger -, est donc prête non pas à occuper ce poste – pour elle, a-t-elle précisé, « ce n’est pas un poste » -, mais à accomplir une tâche que les militants, plaçant sa motion devant les autres, l’ont habilitée à briguer. C’était du beau travail, une fine dentelle brodée au micron près, une partition parfaitement maîtrisée par celle qui en est à la fois l’auteur et l’interprète. Pour qui douterait encore de la consistance de l’entreprise de Ségolène Royal depuis son entrée dans l’arène présidentielle, en 2005, l’épisode de TF1 était révélateur d’une démarche désormais reconnaissable entre toutes et qui embraye fortement sur la réalité politique.
La candidate inattendue de 2007 était guettée au tournant du congrès socialiste. D’accord, elle avait su gagner la primaire, à la faveur des circonstances et grâce à son aura médiatique. Mais primaire, médias, tout cela, au fond, est étranger au parti, à ses sections, ses fédérations, ses contributions, motions et courants. Quand les socialistes se retrouveraient entre eux et avec leurs rites, les vrais compteurs homologués donneraient la mesure de la densité spécifique du « ségolénisme ». Or la démonstration a été faite que, dans ce parti affaibli en tant que parti, cette offre-là apparaît comme la moins faible.
Ses chances de l’emporter sont d’autant plus grandes que la logique institutionnelle, au sein du PS, est inverse de ce qu’elle fut. Ce n’est plus obligatoirement au congrès, dans la commission des résolutions de sa dernière nuit, que se forme une majorité soutenant un premier secrétaire. Comme celui-ci est élu ensuite par les militants, les contours de la majorité peuvent êtres définis plus tard, quand se négociera la composition du secrétariat national. La présidentialisation, devant laquelle les adversaires de Ségolène Royal font mine de se récrier, est acquise, et l’avance que lui ont donnée les militants montre qu’ils en ont pris acte.
Cette évolution a sa raison principale non pas dans les réformes statutaires, mais dans l’histoire des dix dernières années, au cours desquelles le PS a perdu l’assurance de désigner un des deux candidats au second tour de l’élection présidentielle. L’alternative à la droite ne lui appartient plus en propre. Il doit la disputer, dans le meilleur des cas, au centrisme, avec lequel l’affrontement et le dialogue sont devenus inévitables.
La rénovation du Parti socialiste devra beaucoup à François Bayrou. Lequel a tout à y gagner et tout à y perdre.
Courriel : jarreau@lemonde.fr.
Article paru dans l’édition du Monde du 15.11.08.
Créé par sr07 le 13 nov 2008 | Dans : Parti socialiste, Ségolène Royal
Ségolène Royal fait durer le suspense sur sa candidature au poste de premier secrétaire du PS, reconnaissant en avoir «envie», tout en soulignant vouloir «pousser en avant une nouvelle génération»…
FRANÇOIS VIGNAL dans Libé du 13/11/2008
Alors, candidate au poste de premier secrétaire du PS ou pas? Pour le moment, il faudra se contenter d’une réponse alambiquée de la part de Ségolène Royal. «C’est vrai que j’en ai envie», a simplement indiqué ce soir la socialiste, invitée du 20 heures de TF1.
«Les militants ont voté. Ils ont donné une légitimité au projet» défendu par sa motion, a-t-elle expliqué. «C’est vrai que je ne suis pas une femme d’appareil. Mais nous vivons une époque historique, avec un tournant majeur», en raison de la crise économique.
Candidate donc ? Pas tout à fait. Car elle souligne aussitôt n’avoir «jamais fait de (sa) candidature un préalable au rassemblement des socialistes». Et d’ajouter: «Je veux pousser en avant une nouvelle génération», évoquant Vincent Peillon, dont le nom est souvent cité comme possible premier secrétaire, et Manuel Valls. Mais prenant soin de ne fermer aucune porte, elle rappelle qu’elle «prendra toute (ses) responsabilités»…
La question du Modem «se posera dans le futur entre-deux tours de la présidentielle»
Disant vouloir «être rassembleuse pour tous», elle affirme avoir rencontré «Bertrand (Delanoë), Martine (Aubry) et les autres», et leur avoir «envoyé un document de travail». «C’est à eux de regarder ce document». Autrement dit, la balle est maintenant dans leur camp. «Si ce cheminement doit se poursuivre pendant le congrès, ce n’est pas un drame», a-t-elle ajouté.
Interrogée sur la question d’une possible alliance avec le Modem, elle s’est tenue à la même réponse que jusqu’à présent. A savoir, d’abord rassembler à gauche, puis s’ouvrir aux autres. A croire qu’elle s’y voit déjà, elle précise que «cette question se posera dans le futur entre-deux tours de l’élection présidentielle, et franchement on en est loin. (…) Mais j’ai dit très clairement que le PS doit ouvrir ses portes et ses fenêtres.» Or, ça, «Bertrand», «Martine» et leurs amis ne sont peut-être pas prêts à en entendre parler…
Créé par sr07 le 03 nov 2008 | Dans : Parti socialiste, Ségolène Royal
Interview dans La Tribune du 1er novembre 2008
La Tribune : Après la crise financière, on sent poindre une crise économique, craignez-vous une crise sociale dans la foulée ?
Ségolène Royal : Mais elle est déjà là. Le nombre de travailleurs pauvres a augmenté, la précarité et le chômage aussi. Même les cadres se sentent tirés vers le bas : une majorité d’entre eux se déclare en situation de déclassement social. Dans beaucoup d’entreprises, la colère monte. Et elle prend d’autant plus d’ampleur que, tout d’un coup les salariés, réduits au pain sec, découvrent que pour sauver le système financier on peut mobiliser très rapidement des dizaines de milliards d’euros. Par ailleurs, les mêmes qui parlent aujourd’hui de mettre des règles dans le système financier, continuent à casser les règles du code du travail. Tout cela me semble très dangereux. Pour que la dynamique économique reparte il faut que les salariés soient sécurisés, bien formés et bien payés. Les entreprises seront alors plus performantes parce que la productivité horaire du travail sera meilleure. Voilà le cercle vertueux dont la France a besoin.
Si vous étiez aux manettes que feriez-vous face à la multiplication des plans sociaux ?
D’abord je fais entrer l’Etat au capital des banques pour sauver les entreprises. Dans le même temps, je répercute la baisse du brut en baissant les prix de l’énergie. J’augmente immédiatement le pouvoir d’achat en supprimant le paquet fiscal que je transforme en un 13ème mois pour 8 millions de salariés. Et enfin je stoppe les délocalisations boursières. Et tout cela tout de suite. Arcelor Mittal a par exemple décidé de fermer ses hauts fourneaux en Europe. C’est impensable alors que la demande mondiale d’acier continue à augmenter. Ce groupe fait des profits. L’Etat doit demander aux entreprises qui pratiquent de telles délocalisations de rembourser la totalité des aides et des exonérations de cotisations. Elles y réfléchiraient à deux fois.
Avez-vous songé aux conséquences que cela aurait sur les investissements étrangers ?
La France est un des pays les plus attractifs au monde. Il n’y a aucune raison que cela cesse. Quand on regarde de près les motivations des investissements étrangers, on constate que notre pays est apprécié parce que son système éducatif, son système de santé, son réseau de transports et de communication sont performants. Il faut aussi de méfier de ces chantages supposés. Regardez ce qui a été dit au sujet du bouclier fiscal : c’était soi-disant le meilleur moyen de rapatrier les fortunes en France. Aucune fortune n’est revenue. Parce qu’il faut tout déclarer pour en bénéficier ? Je rappelle que le coût de la fraude fiscale est de 40 milliards, c’est-à-dire la quasi-totalité du déficit public de l’Etat.
D’une façon générale comment jugez-vous la gestion de la crise par Nicolas Sarkozy ?
L’annonce précipitée d’un plan d’un plan tous les deux jours est la traduction de l’inertie qui a prévalu depuis son élection. Car il a été élu dans un contexte de crise économique qui appelait des mesures immédiates. Or qu’a-t-il fait depuis un an et demi sur le plan économique : le bouclier fiscal et les mesures les plus irresponsables demandées par un Medef ami du pouvoir, avec des riches qui paient moins et tous les autres qui sont précarisés. Il n’y a plus qu’en France que le législateur se plie aux caprices d’un certain patronat, allant jusqu’à bafouer des accords entre partenaires sociaux. Vous vous souvenez que l’Etat, après avoir encouragé le patronat et les syndicats à négocier, s’est ensuite assis sur la négociation pour en casser le résultat par la loi. Or il est prouvé que la qualité du dialogue social est un moteur d’efficacité, parce que c’est gagnant pour l’entreprise et gagnant pour les salariés. Mais pour cela il faut la confiance et par ces méthodes d’un autre âge la confiance a été brisée.
Les parachutes dorées, les stocks-options sont aujourd’hui sur la sellette…
Pas du tout. Nicolas Sarkozy souhaite que le Medef s’autodiscipline ! Ah bon ? Les gens vont décider eux-mêmes de baisser leurs salaires ? Vous y croyez ? Et si au moins, la politique économique menée depuis un an et demi avait été efficace ! Regardez ce qu’en pensent les patrons de PME : 90% d’entre eux estiment que rien de rien n’a été fait pour eux. J’aurais fait le small business act tout de suite. J’aurais tout fait, comme nous l’ont encore demandé de jeunes patrons d’entreprises de pointe à Toulouse, pour qu’ils puissent augmenter leurs fonds propres et que les banques prennent des risques sur l’innovation. C’est pour cela qu’il faut des fonds d’innovation et la banque publique d’aide aux PME. Pourquoi une banque publique ? Parce qu’elle sera dispensée de spéculer et se concentrera sur l’aide aux entreprises qui innovent.
Nicolas Sarkozy a-t-il suffisamment œuvré pour débloquer le marché interbancaire ?
Le marché interbancaire pouvait être débloqué en 24 heures ! Quand l’Etat met dix milliards dans les banques, il est en droit d’attendre que les banquiers lui obéissent. Non seulement les banquiers qui ont failli sont toujours en place (malgré les promesses de sanctions), mais le crédit interbancaire n’est toujours pas débloqué.
Qu’est-ce qui manque ? La pression sur les banques ?
Ce qui manque, c’est l’autorité de l’Etat. Ce qui manque, c’est que l’Etat entre au capital des banques ! Ce qui manque, c’est de la cohérence, c’est le respect des contribuables qui sont en droit d’attendre que l’on agisse en leur nom. En revanche, ce qui ne manque pas, c’est une connivence de classe comme il n’y en a nulle part ailleurs en Europe entre le pouvoir actuel, certains banquiers et certains grands patrons, notamment ceux qui sont propriétaires des médias. Comme je l’ai déjà proposé, aucun groupe financier ou industriel vivant de la commande publique ne devrait posséder plus de 25% d’un média. Car si les médias, au nom de l’opinion publique, étaient beaucoup plus sévères pour contrôler les mauvaises décisions et exiger les bonnes, au nom du bon sens, nul doute que les choses iraient mieux.
Nicolas Sarkozy a quand même mis d’accord tous les pays de la zone euro sur le plan coordonné…
C’est Gordon Brown qui a été le déclencheur de cet accord, mais reconnaissons que tout le monde y a mis du sien… Et même s’il vaut mieux tard que jamais, tout le monde sait que cela aurait pu être fait plus tôt. Il aurait fallu bouger dès l’année dernière, au moment de la crise des subprimes. Les banquiers savaient parfaitement qu’il y avait des financements croisés entre les banques françaises et américaines, que des banques françaises avaient acheté des créances douteuses. Comment Nicolas Sarkozy et Christine Lagarde peuvent-ils oser affirmer qu’ils découvrent la crise financière ? Soit ils mentent, soit ils sont incompétents.
L’Union européenne a décidé de lancer un plan d’action pour soutenir l’économie. La soutenez-vous ?
Oui bien sûr et je souhaite que ce plan s’accélère et que cela réussisse. Il y a des leviers considérables de croissance économique : habitat durable, éducation, santé, grandes filières industrielles, automobile, aéronautique, sidérurgie, tout cela en relevant le défi de la lutte contre le réchauffement planétaire.
La crise va-t-elle au moins permettre de conforter la construction européenne ?
La crise peut être une chance si elle permet de changer le système, les règles du jeu, les rapports de force et non pas consolider un système perverti qui vient d’aller dans le mur. Si rien n’est fait, on sait qu’il y aura d’autres crises, en raison notamment des pratiques prédatrices de fonds d’investissement non réglementés, qui, comme avec la CAMIF, cherchent à faire du profit sur le dos des PME. Le risque c’est que tout recommence, puisque rien ne change. Les traders sont toujours payés en fonction de l’argent qu’ils retirent des spéculations boursières, sans aucune pénalité quand ils font perdre de l’argent.
Certains économistes disent que les fonds alloués aujourd’hui aux banques vont créer une nouvelle bulle spéculative…
C’est possible parce que ces 10 milliards, ils vont où ? Ils sont utilisés comment ? On ne sait pas. On est quand même dans un système fou. Si cela se trouve, les banques continuent à spéculer avec ces fonds, puisque l’Etat n’est pas au conseil d’administration et n’exige pas que ces 10 milliards soient uniquement utilisés pour octroyer des crédits interbancaires ou pour financer l’innovation des PME. C’est très grave : l’Etat a trouvé de l’argent pour les coupables de la crise et ses victimes, les entreprises et les ménages, les contribuables, n’ont aucun moyen de savoir comment leur argent va être utilisé. Pourquoi n’y aurait-il pas dans les conseils d’administration des épargnants, des citoyens, des associations de consommateurs, le centre des jeunes dirigeants, la CGPME… Voilà la vraie réforme de la gouvernance des banques.
La gauche européenne est restée bien muette dans cette crise.
C’est dommage. Le Parti socialiste européen devrait se faire entendre. Peut-être est-ce à cause d’une structure trop lourde, mais il n’est pas trop tard pour organiser un forum global sur le nouveau système de société et de production qu’on doit mettre en place. En plus la crise est une opportunité pour les idées de gauche. Il y a une réhabilitation du rôle de la puissance publique. Il ne s’agit pas non plus de tomber dans une économie étatisée mais de prouver que les droits et les devoirs, cela doit être pour tous, à chaque échelon de la société.
Et comment expliquer que le Parti socialiste français ne prenne pas aujourd’hui plus de poids, dans un contexte qui lui est favorable ?
Parce que le PS doit se reconstruire. Je ne vais pas en rajouter sur la nécessité pour le PS de changer, de se rénover en profondeur et de porter un projet alternatif à la hauteur des défis du temps présent.
Propos recueillis par Hélène Fontanaud, Ivan Best et Pierre Kupferman
Créé par sr07 le 03 nov 2008 | Dans : Parti socialiste, Ségolène Royal
Interview dans Le Parisien, du 2 novembre 2008
Le Parisien : La crise ne sonne-t-elle pas l’heure, à droite comme à gauche, des personnalités fortes et pragmatiques ?
Ségolène Royal : Les Français découvrent que les hauts dirigeants des entreprises et de la finance internationale ont emmené le système dans le mur. Pour changer la donne et le rapport de forces afin que la crise serve à quelque chose il va falloir, oui, beaucoup de courage, un esprit visionnaire et aussi ne pas être lié aux puissances d’argent.
Face à la rapidité de mutation du capitalisme, les socialistes n’ont-ils pas, à chaque fois, un métro de retard ? Pas toujours !… Souvenez-vous de ce que j’avais dit pendant la campagne présidentielle et qui m’a valu parfois tant de sarcasmes : je parlais des rémunérations excessives des traders, du nécessaire recentrage des banques sur leur coeur de métier, de l’interdiction des paradis fiscaux, de la création de fonds public d’aides aux PME, de la sécurisation des salariés comme instrument majeur de l’efficacité des entreprises. Je n’étais absolument pas en retard, bien au contraire. En revanche, on ne peut que constater l’échec cinglant de la politique économique de la droite depuis un an et demi. Une politique qui se résume au bouclier fiscal, c’est-à-dire à un avantage aux rentiers.
Le PS n’a donc pas, selon vous, à revoir son logiciel, à aller plus loin ?
Bien sûr qu’il faut aller plus loin, et certainement pas en revenant aux idées de la social-démocratie , et encore moins aux idées libérales ! La social-démocratie a été opérationnelle à un moment donné de l’histoire. Mais comment ne pas constater qu’elle a été tenue en échec dans plusieurs pays européens ? Pourquoi ? Parce qu’il faut un Etat préventif qui change les rapports de force et non pas, comme dans la social-démocratie, un Etat secouriste qui ne remet pas en cause le système. Quand j’entends certains socialistes vanter les vertus en 2008 du modèle social-démocrate, je suis stupéfaite, car c’est un modèle périmé. C’est un nouveau modèle qu’il faut inventer. Avec une lucidité radicale sur de nombreux sujets…
Lesquels ?
Il faut, par exemple, obliger les entreprises qui font des bénéfices à rembourser tous les fonds publics afin de stopper les délocalisations et les licenciements. Je l’ai fait dans la région que je préside. Il est urgent de le faire à l’échelle nationale car des entreprises profitent actuellement de la crise voyez le comportement scandaleux d’ArcelorMittal en Lorraine pour accélérer certaines délocalisations. J’insiste : quand des entreprises se comportent mal, il faut être avec elles radical et, à l’inverse, tout faire pour sécuriser les PME innovantes en facilitant des compromis sociaux entre salariés et employeurs afin que tous défendent ensemble l’intérêt de l’entreprise.
C’est cela, le socialisme ?
Oui. C’est le socialisme du XXI e siècle, revisité à la lumière des immenses défis d’aujourd’hui. Une pensée politique doit toujours être en mouvement. Avec un certain nombre de repères intangibles.
Et c’est quoi « le » repère intangible du socialisme ?
C’est vouloir humaniser le monde. Regardez comment il en a besoin, le monde aujourd’hui ! L’Amérique de Bush a pensé et Nicolas Sarkozy reste fasciné par ce modèle-là que ce qui crée la richesse, ce n’est pas le travail bien payé mais la société de consommation à tout-va, fondée sur le surendettement des ménages, juteux pour les banques. Résultats : la crise planétaire, les salaires des équipes dirigeantes multipliées par dix en dix ans, les inégalités qui se creusent. Le salaire moyen des 50 patrons français les mieux payés a augmenté de 20 % durant la seule année 2007 et, pendant ce temps-là, la moitié des cadres a perdu du pouvoir d’achat. Or si les cadres sont démotivés, ça va très mal se passer dans les entreprises ! On ne va pas attendre trois ans comme cela. Il faut que Sarkozy rectifie la trajectoire. Seule une pression de l’opinion et un PS à l’offensive pourront l’y forcer. Les salariés désespérés de la Camif avec lesquels j’étais vendredi, qui voient les milliards pour les banques et rien pour eux, me disaient : « Sarkozy, avec de telles fautes professionnelles, mérite un préavis de licenciement pour 2012 ! »
Si votre motion obtient une majorité relative des suffrages, avec qui êtes-vous prête demain à passer alliance pour gouverner le PS ?
Tous ceux qui voudront nous rejoindre seront les bienvenus. On aura voté sur un projet. A partir de là, il n’y a pas d’interdit, pas d’exclusive. Parce que j’aime les militants, je ne suis pas rancunière. C’est pour eux que, dans cette période, je n’ai pas répondu aux attaques.
J’ai tracé ma route. Les militants auraient pourtant apprécié qu’un peu de respect soit demandé à M. Rocard par Bertrand (NDLR : Delanoë) , qui promet de la discipline. De même, comment Martine (NDLR : Aubry) peut-elle accuser le PS de ne pas avoir travaillé alors qu’elle a en charge, depuis trois ans, les questions sociales et l’emploi, comme secrétaire nationale chargée de ces questions ? Est-ce une autocritique ? Il faudra donc que le travail et le respect soient enfin les règles au parti. Donc, tout le monde est utile, mais il est temps que ça change et de donner des responsabilités à une nouvelle génération. Déjà, il y a un pack opérationnel qui fait une belle campagne collective : Vincent Peillon, François Rebsamen, Julien Dray, Delphine Batho, Najat Belkacem, Manuel Valls, Dominique Bertinotti, Jean-Jack Queyranne, Aurélie Filippetti, Guillaume Garot et, bien sûr, Jean-Louis Bianco, Jean-Pierre Mignard et Gérard Collomb.
En cas de succès de votre motion, serez-vous candidate au poste de premier secrétaire ?
Il y a un leadership politique qui continue et continuera. Est-ce que je l’assumerai en étant à la tête du PS ? On verra. Une évidence : une personne, quel que soit son talent, ne peut pas relever à elle seule tous les défis qui attendent notre parti. Il y aura demain des responsabilités bien identifiées et clairement déléguées. Dans un esprit d’équipe, avec un animateur d’équipe. Mais, aujourd’hui, l’heure est au choix entre des projets, et celui que je défends est le seul à assumer une continuité avec la campagne présidentielle de 2007. Il est très important que les militants choisissent à la fois le changement en profondeur du parti et la fidélité aux millions d’électeurs qui se sont reconnus dans ces idées. Indépendamment de ma personne, la présidentielle a été, en effet, un très grand moment de l’histoire des socialistes, spécialement pour les catégories populaires. Ce sont elles qui nous ont permis d’accéder au second tour. Tous ceux qui ont manqué de respect au vote des militants en critiquant ou en ne soutenant pas la candidate choisie par eux méritent-ils, moralement, leurs voix aujourd’hui ? Seule la droite pourrait s’en réjouir.
Propos recueillis par Philippe Martinat et Dominique de Montvalon
Créé par sr07 le 15 oct 2008 | Dans : Parti socialiste, Ségolène Royal
LEMONDE.FR avec AFP | 15.10.08
Avec la crise financière, « la page du libéralisme est tournée » estime Ségolène Royal. Dans un entretien à paraître jeudi 16 octobre dans le Nouvel Observateur, la présidente PS de la région Poitou-Charentes formule ses propositions face à la crise financière. Ségolène Royal demande que « tous les responsables bancaires qui ont fauté soient interdits de profession bancaire ».« Je ne fais aucune confiance au Medef et à tous les banquiers qui y siègent pour établir des codes de bonne moralité ! », déclare Mme Royal.« Puisque Nicolas Sarkozy a parlé à juste titre de sanctions, ce qui est attendu, c’est que tous les responsables bancaires qui ont fauté soient interdits de profession bancaire. Sinon tout n’est qu’incantation », ajoute-t-elle.
Mme Royal décline ses propositions pour mettre « la finance au service de l’économie productive » et « l’économie au service du développement humain et écologique » : « réglementer les reventes de créances douteuses parce que c’est ce qui a mis le feu au système », « créer une véritable banque publique pour financer durablement les PME et relancer l’économie », créer « un ministère franco-allemand du développement économique destiné à financer la croissance verte ».
L’ex-candidate PS à la présidentielle souhaite aussi que la Banque centrale européenne joue « un rôle de vrai gendarme auprès des banques ». « Il faut enfin s’attaquer au problème des paradis fiscaux et du secret bancaire pour de bon (…) Ce serait une belle preuve de courage et de discernement ! »