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Créé par sr07 le 21 nov 2016 | Dans : Articles de fond, Economie, Front de gauche
Marianne : Depuis des dizaines d’années, les économistes dits «néoclassiques» se présentent comme les praticiens d’une science «expérimentale», au même titre que la physique, la chimie… Vous les voyez plutôt comme les adeptes d’un credo qui n’a rien de scientifique. Selon vous, leurs présupposés sont erronés, et jamais on ne s’est tant trompé qu’en suivant leurs analyses…
Jacques Généreux : Dans cette branche de l’économie s’est produite une impressionnante dérive au long du XXe siècle, qui permet de conclure qu’il ne s’agit plus du tout d’une démarche scientifique. Voilà un mainstream – une orthodoxie – qui enseigne dans les facultés le modèle abstrait d’une économie de marché idéale, toujours en équilibre et sans crises. Or, toutes les sciences humaines et sociales ont démontré qu’aucune économie réelle ne peut fonctionner comme dans ce modèle dont toutes les hypothèses fondamentales sont fausses.
Par exemple ?
Par exemple : l’hypothèse de rationalité des comportements selon laquelle tous les individus cherchent et sont capables de maximiser leur espérance de satisfaction, avec des préférences stables. La psychologie et la neurobiologie nous apprennent que nous ne fonctionnons pas ainsi. La réplique du mainstream a été de dire, avec l’économiste Milton Friedman : on sait que les hypothèses de base sont fausses, mais ce n’est pas grave car, ce qui compte, ce n’est pas le réalisme du modèle, mais celui de ses prédictions pratiques ! C’est ça, la «déconnomie théorique» : une science-fiction dont les auteurs, contrairement à tous les scientifiques du monde, conservent des hypothèses qu’ils savent parfaitement fausses !
Mais il y a aussi une «déconnomie politique». Vous faites le décompte des erreurs de politique économique qui ont découlé des théories du mainstream.
Près d’un siècle après les années 20, nos gouvernements, leurs conseillers et les économistes dominant les facultés nous rabâchent les mêmes âneries que leurs ancêtres avant et pendant la Grande Dépression. Notamment qu’il faudrait réduire les dépenses et les salaires pour relancer l’économie ! Cent ans après Keynes, nos élites dirigeantes semblent ne rien comprendre à la macroéconomie et aux crises.
En vous lisant, on a l’impression que la bêtise gouverne le monde, comme la folie dont Erasme faisait l’éloge au XVIe siècle.
L’économie vire réellement à la folie. Le capitalisme actionnarial, c’est-à-dire le primat de la rentabilité financière, n’est pas seulement injuste et inefficace. Il engendre la souffrance au travail, il tue des gens et détruit notre écosystème. L’analyse économique dominante n’est pas simplement discutable, elle est souvent absurde. Et les politiques anticrises aggravent les crises ! Tout cela est à la fois stupéfiant, incroyable, stupide… Ce que je résume en «déconnant», pour attirer l’attention sur une dimension négligée, sur ce qui ressemble à un effondrement de l’entendement. Que tout cela soit associé au pouvoir de l’argent, à l’emprise croissante et cynique d’une ploutocratie, c’est évident. Mais je crois qu’il est nécessaire de regarder au-delà du pouvoir du capital pour comprendre aussi celui de la bêtise. Aller au-delà de l’analyse marxiste de la domination du capital, qui conserve hélas toute sa part de vérité…
C’est ce qu’affirme le milliardaire Warren Buffett : «La lutte des classes existe, et nous, les riches, nous l’avons gagnée…» Et on pourrait ajouter comme Gramsci : les théoriciens du mainstream traduisent cette domination économique et politique en domination culturelle. Mais vous affirmez que cela ne suffit pas à comprendre le phénomène dans sa globalité ?
Vous qui êtes dans la presse, vous savez bien que des intérêts puissants sont à la manœuvre, qu’il y a des lobbies à Bruxelles et ailleurs. Mais cela n’explique pas tout, parce que la domination ne peut exister sans le consentement des gens, dans des pays où de simples bulletins de vote peuvent changer les gouvernants tous les cinq ans. Et, sauf à faire l’hypothèse saugrenue que tous les élus, tous les journalistes, tous les experts et tous les professeurs d’économie sont stipendiés par de grandes firmes pour se faire les défenseurs du capital, il faut prendre au sérieux l’hypothèse que tous ceux-là peuvent se tromper en toute sincérité. J’essaye donc de préciser comment une nouvelle hégémonie culturelle, au sens gramscien, a pu s’installer. Je montre que même des esprits très brillants raisonnent de travers et disent des absurdités. C’est un enjeu central de mon livre : il faut comprendre la bêtise des intelligents.
Vous êtes allé chercher dans les sciences humaines, la psychologie, la sociologie cognitive, les neurosciences, la clé de cette énigme ?
La biologie de l’évolution et la psychologie cognitive ont montré que notre cerveau n’a pas été conçu pour la pensée rationnelle bien pesée ni pour l’intelligence du monde, mais pour la survie, le succès social et la reproduction. Nous sommes capables d’une grande intelligence, mais celle-ci n’est pas un réflexe. Notre pensée réflexe est truffée de biais cognitifs qui nous prédisposent aux raisonnements erronés et à l’entêtement imbécile, même lorsqu’on est polytechnicien, énarque ou prix Nobel…
Le modèle des économistes orthodoxes est ainsi fondé sur un «biais microéconomique» : ils croient comprendre tous les phénomènes sociaux uniquement à partir du calcul économique d’individus autonomes. Cela exprime le fonctionnement réflexe de notre cerveau, car la propension à ramener tout événement à un acteur responsable et à une intention est un avantage pour la survie et la compétition sociale. D’où le grand succès des théories du complot. Nous extrapolons aussi souvent à tort notre expérience personnelle, qui est forcément micro-économique, pour comprendre (de travers !) des problèmes macro-économiques. Par exemple, un chef d’entreprise confronté à une récession cherche naturellement à réduire ses dépenses pour éviter la faillite. Mais si l’on en déduit que le gouvernement devrait imposer au pays tout entier une baisse générale des dépenses et des salaires, c’est une pure folie qui peut effectivement mener bien des entreprises à la ruine.
Les biais cognitifs dont nous souffrons tous – citoyens, entrepreneurs – expliqueraient notre acceptation du système ?
Disons plutôt qu’ils sont un facteur permissif. Nous sommes prédisposés à préférer le statu quo au changement incertain et les explications simplistes aux réflexions complexes… des sujets idéaux pour une manipulation de masse ! Depuis trente ans, cette prédisposition est exploitée et accentuée par la formation économique universitaire, où les pratiques sectaires du mainstream ont conduit à éradiquer l’analyse critique du système économique et à éliminer l’enseignement des autres courants de pensée. Pour un cadre, un journaliste ou un élu formés à cette école, il est donc entendu que le système actuel du capitalisme actionnarial et de la guerre économique généralisée est un simple fait de nature, et non un choix discutable. C’est une pensée de poisson rouge qui ne se pose pas la question de savoir ce qu’il pourrait faire à l’extérieur du bocal…
Vous dites : «La culture de la guerre économique doit être relayée des années durant par une foule immense de journalistes et d’experts censés éclairer les masses… Jusqu’à ce qu’elle cesse d’être un objet de débat.» C’est orwellien. Nous sommes en 1984, il n’y a plus d’alternative possible, c’est cela ?
Bien au contraire, l’alternative est simple à concevoir. L’état de guerre économique est un choix politique délibéré, pas une catastrophe naturelle. Je montre que la modification de quelques réglages financiers, sociaux et fiscaux suffit déjà à transformer radicalement notre système économique. Le plus stupéfiant, c’est que seule une petite minorité profite de ce système et des politiques imbéciles de nos gouvernements. Même la plupart des entrepreneurs auraient intérêt à un autre système, où la compétition serait mieux régulée et où l’économie ne serait pas menacée régulièrement par des crises financières !
Donc l’alternative progressiste n’est pas bloquée par la prétendue absence des marges de manœuvre ni par les intérêts bien compris de la majorité. Il faut reconsidérer deux blocages trop souvent oubliés : celui de l’intelligence et celui du système politique. L’éducation doit donc être repensée pour former un peuple de citoyens animés par le goût de la réflexion critique, entraînés à la délibération et à la reconnaissance de leurs propres biais cognitifs. Quant au système politique, on voit bien que, dans une société de communication instantanée, la démocratie représentative n’est plus qu’un marché des bulletins de vote régi par le buzz médiatique, les émotions fortes et les images chocs, bref, un terrain de jeu idéal pour la pensée réflexe la plus bête. Les citoyens sont dépossédés du pouvoir réel, au profit de prétendus «représentants» qui font carrière sur un marché qui sélectionne les plus doués pour la lutte des places, et non pas les plus compétents ni les plus engagés dans la quête du bien commun. Il est urgent de restaurer les conditions d’une souveraineté citoyenne réelle et de l’intelligence collective. Car la psychologie cognitive nous apprend aussi que les biais qui nous prédisposent à raisonner de travers, lorsque nous sommes en compétition les uns contre les autres, se transforment en atouts pour la résolution de problèmes complexes, si nous sommes placés en situation de délibération collective et coopérative, à la manière de ce qui se passe dans les conférences de citoyens tirés au sort.
Mais, s’il suffit de délibérer, de prendre la parole, qu’est-ce qui en empêche les citoyens ?
C’est d’abord le fait que les citoyens n’ont pas le pouvoir ! Délibérer pour délibérer ne change pas grand-chose. Il nous faut des institutions qui placent la discussion argumentée entre citoyens au cœur de tous les processus de décision publique. Ensuite, l’essor de l’intelligence citoyenne a besoin de lenteur, de sérénité et de discussions immunisées contre tout enjeu matériel ou de position sociale. Or, nous vivons dans un système qui intensifie le travail comme jamais et place les individus en situation de compétition permanente, de stress, d’urgence… Autrement dit, dans l’environnement le plus propice à la pensée réflexe pour sauver sa peau ou sa place. C’est pourquoi nous avons souvent des comportements politiques surdéterminés par la peur : peur de l’autre, de l’étranger, du terrorisme… Le stress de la compétition nous rend bêtes, au sens littéral du terme.
Mais, à vous lire, l’avènement d’un peuple citoyen n’est envisageable que dans une ou deux générations ! C’est très pessimiste, non ?
Je suis pessimiste dans l’analyse, optimiste dans l’action. Nous sommes peut-être dans un piège systémique. On peut, certes, imaginer la convocation d’une Assemblée constituante de citoyens pour refonder la démocratie. Mais par qui sera-t-elle convoquée ? Pas par la classe politique actuelle car, à part Jean-Luc Mélenchon, aucun leader politique européen n’a inscrit cette convocation à son programme. Et puis, presque partout en Europe, la protestation populaire et légitime contre notre système profite davantage aux populistes nationalistes, voire xénophobes, qu’à la nouvelle gauche progressiste qui, seule, propose une refonte effective de la démocratie et d’une économie humaine. C’est qu’il est plus facile de surfer sur les peurs et les rejets, comme le fait l’extrême droite, que de chercher à convaincre par la raison argumentée. Mais, encore une fois, tous les électeurs sont capables de la plus grande intelligence. Il suffit qu’ils songent à s’en servir pour donner une chance à la transition démocratique vers un autre système économique et politique. C’est à eux de choisir. Si cela ne se fait pas grâce à leur bulletin de vote, il faudra attendre de grandes catastrophes pour que puisse advenir une renaissance. Je préférerais la transition démocratique.
*La Déconnomie, Seuil, 416 p., 19.50 €.
Créé par sr07 le 05 juil 2013 | Dans : Front de gauche
Par Patrick Coulon, Olivier Gebuhrer, Claude Gindin, Michel Laurent, Sylvie Mayer, Guillaume Quashie-Vauclin et Alain Vermeersch. Alors que les principes de gauche sont prédominants, sauver la gauche en la mettant sur ses pieds est une tâche urgente
Les mesures toujours plus austéritaires du gouvernement Ayrault installent un malaise croissant dans la population. « Est-ce cela la gauche ? » se demandent, désorientés, nombre de nos concitoyens[1]. La question fait débat dans toute la gauche – dans le PCF lui-même[2].
Face au paquebot gouvernemental qui fonce droit sur l’iceberg, faut-il quitter le navire Gauche ou tout faire pour en redresser la barre ? Faut-il continuer à se revendiquer de « la gauche » si celle-ci est associée à une politique de régression sociale ? Comment faire vivre l’alternative dans ce contexte de gauche qui déçoit au pouvoir ? Convient-il pour cela de faire un trait sur le PS, EELV, le PRG et toutes les forces gouvernementales ou travailler à construire de larges majorités ?
Interrogations qu’on pourrait résumer ainsi : De quoi la gauche est-elle le nom ? Peut-on la penser autrement qu’on le fait du seul Parti Socialiste ?
Faut-il laisser le gouvernement de gauche aller dans le mur ou miser sur son échec ?
1-1 Le marqueur « gauche » : un recul sensible tous azimuts et particulièrement dans les classes populaires
Force est de constater en effet, et non sans paradoxe, que le rayonnement de la gauche et l’adhésion populaire à cette dernière a reculé.
L’abstention est devenue un phénomène massif, particulièrement dans les classes populaires longtemps davantage enclines à voter, et à voter à gauche. Ainsi, lors de la dernière élection présidentielle, pour 20% d’abstention nationale, c’est 11% à Neuilly-sur-Seine mais 27% à Drancy, Clichy-sous-Bois et 28% à Bobigny. Les résultats sont encore plus frappants pour les élections législatives : près de 45% d’abstention nationalement, c’est 39% à Neuilly mais 49% à Drancy et 60% à Bobigny et Clichy-sous-Bois. La gauche n’arrive plus à mobiliser massivement les classes populaires.
On peut solliciter dans le même sens les enquêtes d’opinion. Il ne reste ainsi plus que 17% des sondés pour penser que les responsables politiques se préoccupent des gens comme eux : la gauche ne fait pas exception. Au-delà, depuis 1988, plus de 75% des Français considèrent comme juste la phrase « Aujourd’hui, les notions de droite et de gauche ne veulent plus dire grand-chose. » C’est surtout le positionnement des ouvriers qui a changé. Entre 1978 et 2002, « le recul de gauche est sévère (–16 points). Il s’accompagne d’une translation relativement limitée, vers droite (+ 4 points). Il se traduit principalement par un basculement vers centre + sans-réponse (+ 12 points). […]Tout se passe comme si, chez les ouvriers, une proportion élevée d’individus avait cessé de pouvoir ou vouloir s’identifier à un « bord de gauche » avec lequel le lien idéologique et affectif s’est rompu. […] En revanche, plus on est ouvrier, moins on se dit au centre et surtout à droite, et plus on se dit ni à gauche ni à droite. […] Les catégories populaires et ouvrières ne sont donc pas devenues majoritairement à droite. La désaffiliation dont témoigne leur niveau élevé de ni gauche ni droite exprime essentiellement chez elles une désaffiliation à gauche. »
1-2 Les idées de droite sont-elles vraiment dominantes ?
Si le discours sur la droitisation de la société est complaisamment relayé[3] – discours fort utile pour ne pas engager de politique de gauche et pour encourager la résignation –, l’étude patiente et méthodique des mentalités dévoile une réalité tout autre. Ainsi, les sociologues Guy Michelat et Michel Simon, à partir d’une analyse sérielle sur quarante ans ont bien montré le renversement idéologique qui s’est opéré en vingt ans. D’une domination sans rivage des valeurs de droite (hostilité à l’action collective, faveur marquée pour le libéralisme économique) voire d’extrême droite (puissance de la xénophobie en particulier) dans les années 1990, on est passé à une prédominance des principes de
Ainsi, « Bourse », connoté négativement à hauteur de 29% en 1988, l’est à 74% aujourd’hui ! Pour « privatisation », on est passé de 36% d’opinions négatives en 1988 à 62% ! Pour « capitalisme » même, l’évolution reste notable : de 50% de rejet en 1988 à 64% !
À l’inverse, les marqueurs de gauche progressent : volonté d’un contrôle public de l’activité économique (29% en 1988 ; 55% aujourd’hui), influence des syndicats de salariés dans la politique du gouvernement (20% la jugeaient insuffisante dans les années 1980 ; 52% maintenant)… Mêmes évolutions du côté des questions de mœurs ou de migrations – homophobie et xénophobie demeurent mais ont perdu grosso modo la moitié de leurs bataillons en vingt ans.
Nuançons toutefois : si les idées qu’on peut à bon droit considérer, avec Michel Simon et Guy Michelat, comme des principes de gauche sont aujourd’hui très largement partagées, l’association consciente de ces idées avec la gauche n’est pas chose assurée. Notre peuple est sans doute plein de M. Jourdain qui ont des idées de gauche… sans savoir qu’elles sont de gauche.
N’est-ce pas le problème majeur de la politique aujourd’hui ? Quand la droite gagne les élections, elle fonce et profite de l’exercice du pouvoir pour marquer la société de ses réformes. Quand le parti socialiste dirige, au mieux, il atténue ce qu’ont fait ses prédécesseurs, tout en conservant leur héritage et en persévérant dans le fatalisme libéral. Comment, alors, ne pas comprendre le désenchantement du peuple de gauche face à la politique menée en leur nom, au nom de la gauche ?
1-3 La gauche reste une réalité de masse
Face à cet inquiétant constat, faudrait-il abandonner la notion de gauche ? Nous ne le pensons pas. Il serait suicidaire de minorer les signaux décrits plus haut, mais il le serait tout autant d’ignorer le potentiel considérable que recèle la notion de gauche comme mode d’identification politique collectif.
Au-delà des réponses des sondés, on peut observer le comportement des Français au cours des dernières élections. Pourquoi le « vote utile[4] » est-il une réalité aussi massive aujourd’hui si ce n’est parce qu’il manifeste l’ancrage populaire d’un clivage significatif et politique entre la droite et la gauche ? Pourquoi se contraindre à voter Hollande quand on aimerait voter Mélenchon si ce n’est parce qu’on a peur que la gauche soit éliminée du second tour ? Cette adhésion à la gauche par rejet viscéral de la droite est une donnée énorme qu’on ne saurait biffer : il s’agit de millions de personnes. Y compris au sein des classes populaires. Ainsi, être ouvrier dans la France d’aujourd’hui, c’est se positionner à 36% à gauche (ce qui est à peine au-dessus de la moyenne) mais à 5% au centre (ce qui est 10 points au-dessous) et à 14% à droite (bis). S’il n’y a pas adhésion enthousiaste à la gauche, il y a bien puissant rejet de la droite. Combien des 45% d’ouvriers se déclarant ni à gauche à ni à droite vont finalement voter à gauche par rejet de la droite ?
Résumons : l’adhésion franche à la gauche et la ferme confiance dans sa détermination à changer positivement et vigoureusement la vie du peuple ont reculé dans des proportions considérables en quelques décennies, particulièrement dans les classes populaires, nourrissant une forte défiance à l’égard de la politique. Ceci posé, d’aucuns avancent que le peuple de gauche est un cadavre froid. C’est ici que l’appréciation paraît borgne. Plutôt qu’un recul unilatéral de l’adhésion à la gauche, ne s’agit-il pas davantage d’une déception par rapport à l’attitude même d’une partie de la gauche qui, au pouvoir, ne tient pas les engagements qu’elle avait pris devant les électeurs ?
Qui partage ce constat n’abandonnera pas la référence à la gauche. Celle-ci est confrontée à une crise majeure. Et elle n’en sortira qu’en mobilisant le peuple au nom même de ce que devrait être la gauche.
2-1 Une crise qui bouche l’horizon de la social-démocratie
La brutalité du capitalisme et l’acuité de sa crise tendent à rendre impossible tout compromis social-démocrate. Inscrivant désormais[5] le capitalisme – souvent même jusque dans son expression libérale – comme horizon indépassable, la majorité socialiste ne parvient pas à mettre en œuvre les politiques de compromis social auxquels elle aspire.
Cette crise historique du socialisme n’est pas pointée par les seuls chercheurs marxistes[6] ou hétérodoxes[7]. Cette abdication du projet social-démocrate est reconnue au sein même des rangs socialistes modérés. Ainsi de l’essayiste Jacques Julliard, qui reconnaît sans détours l’aporie : « Le néocapitalisme a laissé sans interlocuteurs les partisans du compromis social-démocrate[8]. » Quelles conclusions en tire-t-il pour autant ? « Ce sera le grand défi de Hollande : inventer une social-démocratie de troisième type qui renoue le pacte avec le peuple tout en convertissant ce dernier au réalisme. »Retour au point de départ… L’aporie est ainsi perçue mais le cadre théorique dominant au sein de la social-démocratie interdit son dépassement.
2-2 Panne idéologique
Plus largement, d’aucuns évoquent une véritable panne idéologique à gauche. L’essayiste Philippe Corcuff qui parle de crise intellectuelle engourdissant toute la gauche – il parle même de « mort cérébrale »[9]. On peut le rejoindre encore lorsqu’il pointe – après d’autres qui l’ont montré précisément[10] – que l’expertise technocratique ponctuelle – incapable, par principe, de penser l’altérité radicale dans ce monde où règne le « toutes choses égales par ailleurs » – sur fond de démagogie sondagière tend à devenir la règle. L’affichage électoraliste avec les intellectuels médiatiques tient alors lieu de réflexion théorique.
Philippe Corcuff ajoute que l’émergence des think tanks n’invalide pas la tendance, ceux-ci se contentant, le plus souvent, d’expertise parcellaire. Ce point pourrait sans doute être nuancé tant un think tank comme Terra Nova ne cesse de déployer une idéologie aux cohérences fortes, à l’image – inversée – de la Gauche populaire.
Ce tableau recouvre-t-il pour autant la réalité dans sa complexité ? Il peut paraître de bon ton de traiter le parti communiste comme un astre mort. Le risque qu’il le devienne effectivement a sans doute existé. Pourtant, comment ignorer aujourd’hui, au regard de son évolution, de ses réflexions et de ses initiatives politiques, une capacité retrouvée de modifier la donne ? Peut-on tenir pour négligeable l’existence de forces diverses, et ce jusqu’au sein du parti socialiste, qui s’engagent contre la soumission aux dogmes libéraux ? Et ce à un moment où la majorité du PS assume le capitalisme comme seul horizon possible et va jusqu’à désavouer l’objectif de son dépassement.
Résumons : les analystes, qu’ils soient très critiques ou qu’ils le soient moins, s’accordent à parler de brouillard dans lequel se situe idéologiquement le PS : le marxisme, résolument abandonné n’ayant pas été remplacé officiellement par une analyse globale concurrente. Mieux, disons que si des éléments théoriques plutôt construits coexistent en son sein, aucune pensée globale n’est formalisée. On nage, nolens volens, en pleine Weltanschauung[11] conservatrice. Autrement dit, toute théorie économique et sociale étant résolument impensée, on est dans l’idéologie spontanée – donc l’idéologie de la classe dominante selon le mot célèbre de Marx et Engels –, le fameux et indépassable « réalisme » dont parle Julliard – comme tant d’autres.
Ce qui frappe cependant à la lecture des essais et articles qui paraissent sur le sujet, c’est qu’ils sont concentrés sur le seul PS, comme si la gauche s’y résumait… L’existence du Front de Gauche a dynamisé la gauche toute entière. Et s’il reste un espoir c’est aussi parce que le parti communiste n’oppose pas une gauche à une autre et appelle à reconstruire autour d’objectifs communs le rassemblement des forces et des citoyens qui veulent le changement.
Bloquée, la gauche peut redouter le meurtre – la droite n’étant pas inactive. Plus encore, c’est le suicide qui la guette. Ce n’est pas simple formule : tous les pays ne disposent pas d’une gauche[12]. Et si elle n’est pas là pour affronter la finance et les puissants, pour offrir une perspective à proprement parler populaire, à quoi sert-elle ?
3-1 Lutter contre les résignations : politiser
La politisation, la mise en tension et en dynamique politique du plus grand nombre est sans doute la tâche première des forces de gauche. Bien sûr, cela ne se décrète pas et des événements économiques, sociaux ou politiques, indépendants de la seule volonté des partis de gauche peuvent jouer un rôle important de politisation, malgré qu’ils en aient – les luttes syndicales par exemple.
Politiser, c’est stimuler la démocratie en donnant clairement à voir que la chose publique est l’affaire de tous, et non l’apanage de quelques experts auxquels il faudrait s’en remettre pour une bonne gouvernance. C’est appeler activement à l’investissement citoyen le plus large. La campagne du Front de gauche pour l’élection présidentielle, structurée autour de la thématique « Prenez le pouvoir », a montré combien ce message pouvait être largement entendu.
Politiser, c’est stimuler la culture de l’antagonisme – l’antagonisme de classe singulièrement –, et non celle du consensus aujourd’hui omniprésente tant les choses sérieuses sont censées être « au-dessus des partis », « au-delà de la gauche et de la droite », etc. – quand la droite ne manque pas de mêler à l’irénisme de classe un antagonisme raciste.
Pour le dire avec les mots percutants et pertinents du collectif de la revue Vacarme[13] :
« La stratégie d’une gauche de gouvernement qui croit pouvoir apaiser la société par une « présidence normale » et une gestion rigoureuse en faisant l’économie d’une refondation idéologique, […] conception purement électorale et gouvernementale de la société, conçue pour gouverner mais qui paradoxalement, si elle l’emportait intellectuellement, mènerait tout droit la gauche à l’échec en la coupant de son moteur historique : la vitalité d’un social clivé. En 1981, en 1997 et en 2012 — ses seules victoires nationales sous la Ve République — la gauche l’emporte grâce aux mouvements sociaux qui ont précédé les scrutins. Des mouvements sociaux, c’est-à-dire une société en mouvement. »
3-2 Promouvoir l’humain d’abord, le travail et la VIe République
« L’humain d’abord ». Ce mot d’ordre pris comme bannière par le Front de gauche n’est pas un principe lié à une gauche de la gauche voire à l’extrême gauche. C’est un objectif, mais aussi la solution à la crise qui pourrait inspirer toute la gauche. Placer le développement humain comme fin et l’argent comme moyen – et non l’inverse – peut être la logique qui rassemblerait notre peuple.
« Laissez-nous bien travailler » : voilà un mot d’ordre qui sourd de la société, qui résonne et renouvelle le social. Promouvoir le bel ouvrage et non le travail insensé, l’utilité du produit ou du service plutôt que l’obsolescence programmée et l’injonction comptable, voilà ce qui peut unir les créateurs, les chercheurs, les producteurs autour d’un nouveau devenir.
La gauche, c’est la promotion de la Révolution française et du triptyque révolutionnaire de 1848 : « Liberté-Egalité-Fraternité ». Combien de libertés à conquérir ! Quelle égalité à bâtir!Quelle fraternité à ressourcer ! Penser l’engagement citoyen comme la condition de la réussite de la gauche, n’est-ce pas là le seul moyen de faire utilement écho à l’appel de la gauche unanime et des historiens en 1989 : « il reste des Bastilles à prendre ! » ?
3-3 Des bras et des cerveaux prêts à construire ce monde de demain
Cet héritage politique n’est pas un jardin de chimères mortes. C’est un horizon pour lequel des millions de personnes sont prêtes à mouiller la chemise.
Les partis de gauche sont pleins d’adhérents qui ont décidé de s’engager en politique pour faire advenir ce monde juste. Ce sont des dizaines de milliers de personnes mobilisées sur le terrain. Parmi les dirigeants de ces organisations, qui peut dire qu’une majorité stable et sûre est promise à un avenir certain sur des politiques d’austérité ? Les contradictions s’aiguisent activement, ouvrant le possible des convergences potentielles.
Bien au-delà, c’est une gigantesque force sociale qui est disponible, déjà active mais en attente d’initiatives politiques les mobilisant et leur permettant de prendre conscience de leur force commune. Combien d’associations, combien d’ouvriers, d’employés, de cadres sont prêts à s’engager sur ces voies d’émancipation !
Chacun voit chaque jour davantage que notre monde marche sens dessus dessous et n’est plus en mesure de répondre aux exigences et aux potentialités de développement de notre temps mais les broie bien plutôt. L’argent pour l’argent détruit nos vies et cela commence à se savoir, cette conscience faisant croître ce peuple potentiel, prêt à bâtir le monde que le développement de l’humanité appelle.
3-4 Des objectifs immédiats à portée de main : un peu de courage !
Nous sommes d’ores et déjà majoritaires dans la population sur plusieurs revendications de gauche fortes.
L’avènement d’une citoyenneté de résidence, ouvrant le droit de vote à tous ceux qui font et sont la France, est attendue par notre peuple, dans le droit fil de la Révolution française. La liberté appelle la gauche !
La réduction significative de la hiérarchie des revenus est appelée par notre peuple, tout comme l’instauration d’une politique de lutte authentique contre la fraude fiscale. L’égalité appelle la gauche !
L’amnistie sociale, le respect du droit syndical et le renforcement du pouvoir confié aux salariés et à leurs syndicats dans le gouvernement de l’économie sont eux aussi soutenus par la France contemporaine. La fraternité appelle la gauche !
Notre peuple appelle désespérément des mesures de gauche. La gauche doit répondre : il en va de la démocratie, il en va de la raison d’être de la gauche, il en va du développement de notre pays.
On ne baise pas éternellement la main qui vous frappe : l’austérité met la gauche en danger de mort.
Alors, faut-il sauver la gauche ? Le débat se poursuit mais il est clair qu’il y a un héritage fort et qu’il est biface : les conquêtes d’hier ont attaché – et attachent encore – des millions de personnes à cette catégorie ; les déceptions d’hier repoussent des millions de personnes loin de cette catégorie. La politique actuellement menée par le gouvernement de gauche s’enfonce chaque jour davantage dans un marécage éloigné des aspirations populaires : la disparition par noyade est moins impossible que jamais.
Pour nous, assurément, il faut sauver la gauche. Elle est une force bien vivante pour des millions de personnes : on ne peut pas tourner le dos à tout ce peuple politisé quand il s’agit d’élargir cette politisation ! Il s’agit donc de sauver la gauche contre son suicide austéritaire en l’inscrivant dans des combats de gauche mobilisateurs et en phase avec les attentes populaires – permettant ainsi d’aller bien au-delà du consistant mais minoritaire « peuple de gauche » (entendu comme peuple se réclamant explicitement de la gauche).
Alors que l’austérité cache de plus en plus mal son inefficacité et sa cruauté, alors que les principes de gauche sont à un niveau historiquement haut, sauver la gauche en la mettant sur ses pieds est sans doute la tâche urgente de notre temps. Elle ne se fera pas sans un travail politique d’ampleur de notre part.
[1] Dans la floraison éditoriale – qui constitue déjà un signe de malaise –, on fera référence, dernièrement, à l’ouvrage critique de Jean-Claude Michéa, Les Mystères de la gauche, Climats, 2013. Pour un aperçu, voir l’entretien avec Laurent Être (L’Humanité, 15 mars 2013) et le compte rendu d’Yvon Quiniou (L’Humanité, 21 mars 2013) ainsi que celui de Florian Gulli, à l’origine du livre, dans La Revue du projet (n°23, janvier 2013).
[2] La position hostile au maintien de la référence à la gauche trouve sans doute son expression la plus construite dans la contribution d’André Tosel au 36e congrès sur « la gauche qui écœure ». http://congres.pcf.fr/31244
[3] Parmi mille exemples, voir Emmanuel Todd et Hervé Le Bras, Le mystère français, Seuil, 2013, ou encore Raffaele Simone, Le Monstre doux. L’Occident vire-t-il à droite ?, Gallimard, 2010. Pour un aperçu, voir ses entretiens au Monde (12/09/2010) ou à Philosophie magazine (n°36, 01/2010). Plus récemment, voir les gloses du baromètre Ipsos France 2013 susmentionné.
[4] Voir notamment La Revue du projet, n°16, avril 2012.
[5] Ce « désormais » est difficile à dater tant l’histoire du socialisme est, de fondation, plurielle. Si les historiens accordent quelque réalité au « tournant » de 1983 (voir les travaux du colloque sur cette question en Sorbonne les 25 et 26 mars 2013, sous la direction de Michel Margairaz et Olivier Feiertag), ils remettent en cause l’idée d’une rupture brutale sans prodrome ni filiation.
[6] Voir par exemple Jean Lojkine, La Crise des deux socialismes, Le Temps des cerises, 2008.
[7] Dans une perspective européenne, voir notamment les travaux de Philippe Marlière. Pour un aperçu, voir la Revue du projet n°8, mai 2011.
[8] Le Figaro, 25 septembre 2012, à l’occasion de la sortie de son essai de synthèse historique (voir le compte rendu proposé par Jean-Numa Ducange dans L’Humanité).
[9] La gauche est-elle en état de mort cérébrale ?, Textuel, 2012.
[10] Voir particulièrement les travaux de Frédéric Sawicki et de Rémi Lefebvre.
[11] Conception du monde.
[12] La gauche et le clivage gauche/droite ont été rayés de la carte dans maints pays. On peut noter, à rebours, qu’ils tendent à se développer dans des pays comme les États-Unis par exemple. Voir notamment La Revue du projet, n°26, avril 2013.
[13] Vacarme, n°60, « Les fronts de la gauche », 21 mai 2012. http://www.vacarme.org/article2158.html
Créé par sr07 le 04 juin 2013 | Dans : AGAUREPS-Prométhée, Front de gauche, Projet politique, Santé-social-logement
Santé…Protection Sociale…Accès aux soins…
Une seule logique : les besoins humains !
Il ya urgence à opposer, pied à pied, la logique des besoins de santé dans leur totalité à la logique comptable qui régit aujourd’hui tous les aspects de notre vie. Face au diktat de la « règle d’or des 3% de déficits des budgets privés » dont les comptes de la Sécurité Sociale : les besoins en matière de santé sont immenses, diversifiés, impérieux !
Ainsi, la prise en charge des besoins de santé devient un marqueur essentiel pour une politique vraiment de gauche. Le seul raisonnement possible pour apprécier et développer les besoins et les moyens de financement de la protection sociale : l’Humain d’abord !
Aujourd’hui, il doit être à la mesure des exigences portée par la volonté majoritaire de mieux vivre sa vie :
ASSEMBLEE CITOYENNE
JEUDI 6 JUIN à 19 H Salle Georges Brassens à MONT-DE-MARSAN
Avec la participation de :
Maryse MONTANGON
responsable nationale des questions de santé du PCF et militante syndicale
Xavier DUMOULIN
membre de l’AGAUREPS-Prométhée
Créé par sr07 le 12 jan 2013 | Dans : AGAUREPS-Prométhée, Fédérations MRC d'Aquitaine, Front de gauche, Gauche anti-libérale, MRC-PS, Parti socialiste
De gauche à droite sur les 1° et 2° diapositives, Josette Robert, secrétaire nationale du MRC, Florence Delaunay, députée des Landes (PS), Xavier Dumoulin, premier secrétaire MRC Aquitaine et Bruno Moschetto, Maître de conférence à l’Ecole des Hautes Etudes Commerciales(HEC) et à l’Université de Paris 1, par ailleurs secrétaire national du MRC aux questions économiques vues de l’assembléeséance dédicace du livre de B.Maschetto « Tout savoir – ou presque – sur la face cachée de l’Euro », préface de Jean-Pierre Chevènement
Lire l’intervention de Bruno Moschetto lors de l’assemblée citoyenne montoise
DU MYTHE DE LA COMPETITIVITE A LA SORTIE DE L’EURO DANS L’EURO
Tel pourrait être – mes chers camarades – mes chers compagnons – le fil d’Ariane des réflexions que je souhaiterais développer devant vous. Tout d’abord celles-ci passent par une analyse de la réelle compétitivité à l’irréelle croissance.
Premier point de mon intervention.
DU MYTHE DE LA COMPETITIVITE
Dans notre environnement européen contemporain le concept de compétitivité n’est-il pas fondamentalement paradoxal ? La compétitivité qu’est-ce-à dire ? S’agit-il des ou de la compétitivité ?
Les compétitivités peuvent être sectorielles. Ainsi elles peuvent concerner le secteur agricole, le secteur automobile, le secteur aéronautique, le secteur hôtelier, le secteur financier. Issues de la productivité c’est-à-dire du rapport entre la production et les moyens mis en œuvre pour l’obtenir, les compétitivités se mesurent en prix, c’est-à-dire de nos jours en monnaie. Ce grand commensurable selon la formule d’Aristote dans l’Ethique à Nicomaque. Dans un pays déterminé, les taux de compétitivité sectorielles peuvent se compenser et permettre dans les échanges internationaux de bénéficier d’avantages dits comparatifs en fait compétitifs. Où chacun s’enrichit de ses mutuelles différences. Le fait par exemple que la première de nos grandes écoles de commerce caracole en tête depuis plus d’une décennie dans le classement du Financial Times des business schools européennes est un témoignage éclatant d’une compétitivité sectorielle.
Mais la somme des compétitivités forme un bloc de compétence et elle devient par là globale. Celle là tient compte du prix des produits marchands que ce soient des actifs corporels ou non corporels, c’est-à-dire le prix des biens et des services qui dans le combat économique extérieur se réduit au solde de la balance des transactions courantes, alors que seul le déficit de la balance commerciale stigmatise, à tort, les faiblesses compétitives d’une nation.
Mais dans la compétitivité globale, il y a aussi celle issue des produits marchands et celle issue des produits non marchands tels que la protection sociale, les services publics, et plus généralement l’art de vivre. Tout ceci résulte d’un choix démocratique et culturel exercé par chacune des nations. Ainsi, nous déroulons effectivement un tapis rouge à nos amis anglais lorsqu’ils viennent se faire opérer dans les 18 jours de leur arrivée alors qu’il leur aurait fallu attendre 18 mois dans leur pays avec le risque de passer de vie à trépas !
De nos jours, l’accent est mis dans le couple franco-allemand, sur la seule compétitivité des produits marchands et qui se traduit par un insolent excédent de la balance commerciale pour l’Allemagne (150 MD€) et d’un déficit récurrent pour la France (75 MD€ )La France est ainsi réputée être à la traine de l’Allemagne . Mais à la réflexion, l’Allemagne ne tire-t-elle pas par cette soi- disant réussite l’ensemble de ses partenaires de l’Europe, dont la France, vers le bas ?
C’est le rapport de l’Organisation Internationale du Travail (OIT) sur les tendances mondiales de l’emploi en Europe dont les conclusions sont reprises par le Monde du 25 Janvier 2012 – Article qui s’intitule - : « la crise de la zone euro : la faute à Berlin » et qui pose cette impertinente question.
Pour l’OIT les bas salaires outre -Rhin sont une raison majeure de la crise en zone euro « la baisse relative du coût du travail allemand depuis une décennie a mis sous pression la croissance de ses concurrents avec des conséquences néfastes pour la viabilité de leurs finances publiques. En se convertissant à la rigueur dès le milieu des années 90, l’Allemagne a créé au niveau européen les conditions d’un marasme économique prolongé, poursuit le rapport de l’institution onusienne. L’OIT épingle au passage les réformes Schröder qui ont eu pour effet de réduire les revenus du bas de l’échelle notamment dans les services. Je rappellerai simplement que l’heure de baby sitting se rémunère en Allemagne 4€ contre 8 € en France. Tout ceci correspond à ce que l’on appelle la dévaluation interne qui se fait au détriment du monde du travail.
Nul doute qu’il faut pour l’Europe, tout sauf de l’austérité, ( Bruno Moschetto –La Tribune – 20 mars 2010) puisque dans l’équilibre économique , les dépenses des uns sont les revenus des autres. La cure de 30 MD€ annoncée par François Hollande dimanche 9 septembre 2012, équivaut à 1 ½% de la production intérieure brute (PIB) et se traduira immanquablement par une contraction mécanique de l’activité, c’est-à-dire de la croissance tant désirée et qui le sera encore plus. D’ailleurs Joseph Stiglitz, prix Nobel d’Economie, estime que l’Europe court à sa perte en persistant à mener des politiques d’austérité défendues principalement par l’Allemagne, dans une déclaration télévisée faite le même dimanche, et rapportée par le Monde du 11 septembre 2012.
Sans compter qu’à l’instar de la Chine –atelier du monde – l’Allemagne est devenue celui de l’Europe : puisqu’elle achète des produits à bas coût dans son hinterland : les pays de l’Europe de l’Est , les assemble et les vend aux pays de l’Europe de l’Ouest – essentiellement ceux de la zone euro à pouvoir d’achat plus élevé et où, selon la formule de Jacques Sapir, les produits made by Germany remplacent ceux made in Germany.
Ces effets déflationnistes dévastateurs entrainent dans l’opinion et les médias la création d’une chaine de contrevérités . Celle –ci part du constat de l’analyse de la balance commerciale où il apparaît que les pays vertueux se situent au Nord et par là les non vertueux se situent au Sud ; d’où ceux du Sud doivent s’aligner sur ceux du Nord. Il s’agit là d’un véritable contresens . Celui-ci est dénoncé par la parabole du jeu de billes de Jacques Rueff aux termes de laquelle les gagnants de billes (de devises) équivalent billes en matière d’échange internationaux doivent les prêter aux perdants de billes (de devises)sinon il n’y a tout simplement plus de jeu de billes ni de jeu commercialinternational.
Ce contresens est poussé à son paroxysme par le slogan selon lequel l’Allemagne ne veut pas payer pour les pays du Club Med d’ailleurs, il ne s’agit pas de payer mais de prêter. Et s’il n’y a plus de Club Med parce que ces pays ne disposeraient plus de devises i.e. de billes pour acheter, il n’y aurait plus d’Allemagne qui, assise sur son tas de billes i.e. devises ne pourrait plus vendre ses produits.. Dans le même esprit on peut prétendre que le Club Med dont la Grèce a réellement payé pour l’Allemagne du fait de la surévaluation de sa monnaie – l’euro ! Alors comment en sortir ?
D’où les esquisses de solutions. Un autre prix Nobel d’Economie , Paul Krugman dans son dernier livre paru le 5 septembre 2012, intitulé « Sortez-nous de cette crise ;maintenant » en évoque trois possibles. La première l’inflation sur les prix des flux. C’est-à-dire celle qui résulte d’un déséquilibre persistant entre l’offre de produits et la demande de produits sur l’ensemble des marchés de biens et de services.
Créé par sr07 le 10 jan 2013 | Dans : Fédérations MRC d'Aquitaine, Front de gauche, Gauche anti-libérale, MRC-PS, Pacte présidentiel
Chers Citoyens, Chers amis internautes,
Les enjeux liés de la compétitivité, du redressement productif et du
financement de la protection sociale en France
constituent la cadre de la prochaine assemblée citoyenne à l'initiative du
du Mouvement républicain et citoyen
à Mont de Marsan, le samedi 12 janvier 2013 en matinée.
Les enjeux liés de la compétitivité, du redressement productif et du financement de la protection sociale
L'assemblée se réunira à Mont de Marsan autour
d'un large arc en ciel de représentants de toute la gauche
et d'élus du peuple et accueillera notamment l'ntervention de
Bruno Moschetto - secrétaire national du MRC
aux questions économiques internationales
et professeur d’économie à HEC -
dans un salon de l'hôtel des Pyrénées
20 rue du 34èmeRI
Samedi matin 12 janvier 2013 à partir de 10h15mn.
Dans cette perspective de reconquête républicaine,
vous êtes conviés à prendre part à ces échanges.
Pour le mouvement républicain et citoyen, Xavier DUMOULIN
Secrétaire de l'Union régionale Aquitaine du MRC
et président de la fédération MRC des Landes
et des Pyrénées Atlantiques
Comité de coordination de la majorité présidentielle:
travailler à la réussite de la France
Par Catherine Coutard, Vice-présidente chargée des relations extérieures, mercredi 9 janvier 2013.