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Créé par sr07 le 29 oct 2016 | Dans : Blog du Che, Le Che, Projet politique
Créé par sr07 le 30 août 2016 | Dans : Articles de fond, Le Che
FIGAROVOX/ENTRETIEN – Jean-Pierre Chevènement a suscité une polémique après ses propos sur France-Inter. Pour Laurent Bouvet, ces réactions stériles illustrent la place accordée au discours identitaire dans certains médias et partis politiques.
Laurent Bouvet est professeur de Science politique à l’Université de Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelines. Il a publié L’Insécurité culturelle chez Fayard en 2015.
FIGAROVOX. – Ce lundi matin, Jean-Pierre Chevènement a répondu aux auditeurs de France-Inter. Il a assuré qu’à Saint-Denis «80% des enfants à l’école primaire ne maîtrisent pas le français» avant d’ajouter: «Il y a à Saint-Denis, par exemple, 135 nationalités, mais il y en a une qui a quasiment disparu», sous entendant, la nationalité française. Que vous inspirent ces propos?
Laurent BOUVET. – Ce que dit Jean-Pierre Chevènement est, hélas, conforme à une réalité qui ne se limite pas à Saint-Denis. Des rapports officiels, des enquêtes de chercheurs, des témoignages innombrables d’enseignants et de parents d’élèves nous alarment sur cette situation depuis longtemps déjà. Ce n’est donc ni une surprise ni une découverte. D’ailleurs, dans des villes comme Saint-Denis, nombre de parents d’élèves qui en ont les moyens ne mettent plus leurs enfants à l’école publique en raison du niveau très faible des établissements, des «incivilités» comme on dit pudiquement, et donc des moindres chances offertes à leurs enfants. C’est un grave échec, collectif, pour la République, pour l’éducation nationale, pour la société française dans son ensemble. Il y a des quartiers, des villes mêmes, où on (les pouvoirs publics, les citoyens eux-mêmes…) ne se donne plus depuis longtemps les moyens de l’égalité d’accès de tous les enfants à l’école de la République.
Plus largement, on mesure là les effets pervers des politiques publiques menées, au niveau local comme national, depuis 30 ans en matière de concentration urbaine des populations d’origine étrangère qui arrivent en France. Une telle ségrégation spatiale, territoriale, n’est pas fortuite. La République a abdiqué de son exigence égalitaire pour toute une partie de la population, que ce soit en termes de droits ou de devoirs d’ailleurs. Les deux étant indissociables.
Stéphane Troussel, le président socialiste du conseil départemental de Seine-Saint-Denis a accusé l’ancien ministre de l’Intérieur de «dérapage raciste» tandis que le député PS de Saint-Denis a relayé une pétition contre la nomination de Chevènement à la tête de la Fondation pour l’islam. Que pensez-vous de ces accusations de racisme?
C’est lamentable et odieux. D’abord, de manière très simple: que ces élus accomplissent dans leur vie politique la moitié du quart de ce qu’a fait Jean-Pierre Chevènement, que ce soit pour la gauche ou dans les différentes responsabilités publiques qu’il a occupées, et on pourra éventuellement écouter à ce moment-là ce qu’ils ont à dire… Ce défaut désormais de toute profondeur historique et ce mépris pour le service de l’État sont terribles. Mais enfin qui sont ces élus? Qu’ont-ils fait de notable? Qu’ont-ils apporté au pays ou même à leur département?
Ensuite, on voit parfaitement dans quelle logique électoraliste et clientéliste se situe ce genre de critiques, la même que celle qui étaient à l’œuvre d’ailleurs lors des élections régionales l’an dernier dans ce département, autour de la liste de Claude Bartolone et Clémentine Autain.
Enfin, plus largement, il serait bon que dans le débat public, on cesse de traiter à tout bout de champ de «raciste» les gens avec lesquels on est en désaccord. Cette manière de disqualifier quelqu’un en tentant de le renvoyer systématiquement dans le camp des «racistes» conduit à vider ce mot de tout contenu et, donc, à ne plus voir et condamner le racisme lorsqu’il existe réellement et produit ses effets délétères. D’autant, je le note en passant, que leur indignation morale est à sens unique. On n’entend pas ces élus vertueux protester quand d’authentiques racistes organisent à Saint-Denis par exemple des réunions «non mixtes racialement».
Mi-août, dans un entretien accordé au Parisien, Jean-Pierre Chevènement s’était attiré les foudres de nombreux anonymes pour avoir conseillé «la discrétion» aux musulmans dans l’étalage de leur foi dans l’espace public. La formule était-elle bien choisie?
La formule est sans doute maladroite mais ce que dit Jean-Pierre Chevènement se comprend dans une perspective laïque classique telle qu’elle a été reprise et mise en œuvre par la République, comme une suite notamment de la fameuse phrase du comte de Clermont-Tonnerre pendant la Révolution française: «Il faut tout refuser aux juifs comme nation ; il faut tout leur accorder comme individus ; il faut qu’ils soient citoyens». Cette «discrétion» demandée dans l’expression de sa différence, de sa foi religieuse ici, c’est-à-dire d’une part spécifique de l’identité de tel ou tel, étant à la fois la condition indispensable et la contrepartie de l’inclusion dans la communauté des citoyens.
Cela va bien au-delà me semble-t-il du simple conseil de prudence adressé aux musulmans qui voudraient montrer leur appartenance à cette religion dans l’espace public pour des raisons liées au contexte post-attentats et aux risques de tension qu’une telle apparence publique pourrait susciter. On notera d’ailleurs qu’il n’y a pas eu, hors quelques cas limités, d’agressions vis-à-vis de musulmans dans l’espace public. Il y a, bien entendu, toujours des propos voire des actes discriminatoires (on vient de le voir si je puis dire encore récemment à Tremblay à l’occasion de ce qui s’est passé dans ce restaurant), mais cela reste heureusement limité. Et les événements tragiques que l’on a vécus à Paris et à Nice n’ont pas accru ces paroles et ces actes.
Ceux qui veulent «faire du bruit» autour de ce qu’ils nomment «l’islamophobie», ce sont précisément ceux qui souhaiteraient davantage ce type de paroles et d’actes pour montrer combien ils ont raison et combien leur combat est juste, et de là augmenter encore leur emprise idéologique sur les musulmans. Ils sont les complices, objectifs, des responsables politiques et élus qui, à droite et à l’extrême-droite, parient eux aussi sur l’accroissement des tensions entre «communautés». On l’a vu cet été en Corse et à l’occasion des différentes affaires dites du «burkini».
Certaines attaquent, notamment sur les réseaux sociaux relèvent-elles purement et simplement de l’intimidation. Certains courants identitaires, voire islamistes tentent-ils d’interdire tout débat sur l’islam? Les politiques qui s’en font le relais sont-ils complices?
Tout est bon aujourd’hui pour essayer d’intimider et de disqualifier son adversaire. Les réseaux sociaux donnent une visibilité, justement, et une ampleur à ces méthodes classiques. L’idée en effet, chez certains, parmi les islamistes ou chez leurs alliés dans une partie de la gauche (on pense ici, entre autres, au CCIF, aux Indigènes de la République, à certains universitaires et chercheurs, en sociologie notamment, à Médiapart, à une partie du Front de gauche ou d’EELV, et même à certains socialistes!), est d’imposer une forme de doxa, une «vérité» contre laquelle personne ne peut jamais se prononcer sans être à la fois dans l’erreur, la faute et l’abomination. En faisant passer ceux qui la mettent en cause, qui la refusent, qui la critiquent, qui n’acceptent pas une telle manière de penser – très peu laïque pour le coup! – pour des racistes, des «islamophobes», en clair, et conformément à une pratique politique bien connue, pour des salauds.
Or, on le voit désormais tous les jours, on baigne ici en plein sophisme. Le racisme que dénoncent sans cesse ces défenseurs de l’islam radical et plus largement de l’essentialisme identitaire est au cœur même de leur idéologie. Celle-ci est en effet faite d’exclusion: de tous ceux qui n’ont pas la bonne pratique de l’islam, de tous ceux qui défendent la laïcité, de tous ceux qui ne se soumettent pas à leurs injonctions… Ainsi, toute critique de l’islamisme devient pour eux une critique de l’islam et des musulmans ; toute mise en cause de leurs manipulations et mensonges devient du complotisme ; toute affirmation simplement laïque devient «islamophobe».
Le problème, à mes yeux, aujourd’hui, en France, tient moins à l’existence d’une telle folie identitaire, finalement très minoritaire et caricaturale même si elle est active sur les réseaux sociaux, que dans les relais dont elle dispose dans les médias, dans le monde académique ou auprès de nombre de responsables publics. La complaisance pour ce type de discours me sidère. Surtout quand elle se double d’une forme de condamnation de tout discours un tant soit peu laïque. On a vu, au cœur même des institutions de l’État chargées de défendre la laïcité (je pense ici à l’Observatoire de la laïcité), qu’il pouvait y avoir un certain aveuglement voire une certaine complicité avec ces entrepreneurs identitaires qui promeuvent ouvertement l’idéologie islamiste. Les responsables politiques et élus qui, souvent par un intérêt électoral bien mal compris, se font les relais de cette offensive idéologique, portent une lourde responsabilité dans les tensions actuelles. Une responsabilité qu’on peut tout à fait mettre en regard de celle des boute-feux de la droite et de l’extrême-droite.
Cet été, certains politiques s’étaient indigné que l’on confie les rênes d’une fondation liée à l’islam à un laïc revendiqué. «Proposer pour prendre la tête de cette organisation quelqu’un qui n’est pas de culture musulmane, qui n’est pas de sensibilité musulmane et qui n’est pas de culture religieuse, pour moi c’est une interrogation», a notamment expliqué François Bayrou. Fallait-il confier cette fondation à un «musulman»?
Cette polémique est ridicule. On parle là de la création d’un organisme public, pas d’une institution religieuse ou communautaire. Cette fondation sera chargée de mettre en œuvre une politique de l’État, pas de la «communauté musulmane». Et puis, l’idée qu’il faudrait être «de culture religieuse» (sic) pour parler avec pertinence du lien entre État et religion, pour comprendre les enjeux et les nécessités pour la France de la manière dont nos concitoyens de confession musulmane peuvent mieux vivre leur foi tout en participant pleinement à la vie républicaine et au «commun», m’échappe totalement. Comme si on devait avoir tel ou tel critère d’identité pour comprendre et s’exprimer au sujet de celui-ci. À ce compte-là, seules les femmes seraient susceptibles de comprendre et de parler d’avortement, seuls les personnes de telle ou telle couleur de peau seraient capables de comprendre et de parler du racisme, etc. On voit où conduit une telle logique. C’est ce que l’on appelle l’essentialisme: chacun est renvoyé à ce qu’il est, biologiquement, culturellement, socialement… sans jamais pouvoir y échapper ou s’en détacher. Chacun est ainsi réduit à être moins qu’un individu libre de la manière dont il peut composer son identité personnelle à partir des différents éléments qui la constituent.
Tout ceci est profondément contraire à toute perspective de mobilité, de mixité, d’émancipation, de critique, de dépassement de soi… Tout ceci est le contraire des Lumières et de ce pour quoi des millions d’hommes et de femmes se sont battus depuis plus de deux cents ans, partout dans le monde, dans toutes les sociétés et quelles que soient leurs différences et origines. C’est contraire à l’idée d’humanité commune à tous, à l’universalité de l’humanité. Que des gens comme François Bayrou, pour de basses raisons politiciennes sans doute ou par expression de leur foi religieuse peut-être, ne soient pas capables de voir cela, c’est navrant.
Ces polémiques à répétition à l’encontre de Chevènement traduisent-elles finalement une sorte de «racisme à front renversé» ou du moins une dérive «identitariste» du débat public français?
Cela témoigne d’abord d’une forme de détachement du pays, d’une partie de celui-ci du moins, de toute historicité, de toute mémoire. Jean-Pierre Chevènement, que l’on soit d’accord politiquement avec lui ou non, est un des derniers témoins d’une époque politique passée et de l’histoire de la gauche française en particulier. C’est un homme d’État qui a montré, par ses idées, son action, ses choix et ses engagements, ses grandes qualités politiques et intellectuelles. On pourrait au moins lui reconnaître cela.
Cela témoigne aussi de ce que vous dites, assurément. On assiste à propos de Jean-Pierre Chevènement au renversement sophistique dont je parle plus haut. La dérive «identitariste» est en effet très nette dans toute une partie de la vie publique. On constate même que ceux qui prônent un discours identitaire, différentialiste, séparatiste, essentialiste… accusent leurs critiques, les tenants de la laïcité notamment, d’être eux-mêmes des «identitaires». Comme si l’universalisme, la laïcité, l’idée d’émancipation grâce à l’esprit critique… étaient devenus des pratiques «identitaires». Notamment parce qu’elles seraient, c’est un comble, françaises!
Toute cette campagne contre la soi-disant spécificité identitaire française qui s’appuie sur quelques articles de la presse anglo-saxonne est quand même étonnante. D’autant que l’on voit beaucoup d’antilibéraux et anti-capitalistes autoproclamés la relayer sans jamais s’interroger sur ce qu’est cette presse, sur ce que sont ses intérêts et ses buts… Alors qu’il s’agirait de propos sur l’économie, là, les mêmes retrouveraient leur sens critique. Bref… tout ceci est assez pathétique, bassement et bêtement idéologique, dans le sens le plus péjoratif de ce terme. On connaît hélas, depuis les tragédies du XXème siècle, le terme de telles dérives.
Créé par sr07 le 30 août 2016 | Dans : Le Che
le 29/08/2016 à 11:04
LE SCAN POLITIQUE/VIDÉO – L’ancien ministre va prendre la tête de la Fondation pour l’islam de France, malgré ses propos controversés après avoir conseillé la «discrétion» aux musulmans. L’ex-socialiste maintient ses propos et affiche la même fermeté sur le burkini.
Interrogé sur France Inter, l’ancien président du Mouvement républicain et citoyen a clarifié sa vision sur l’islam. «L’islam de France doit être autonome dans ses sources de financement et dans sa pensée», a-t-il dit. «Il y a 1,4 million de musulmans en France, pour la plupart français, il faut faire France à nouveau, créer les conditions qui font qu’ils se reconnaîtront pleinement dans la communauté nationale.» Ainsi, la polémique suscitée par ses propos sur la «discrétion» des musulmans était pour lui injustifiée. «Ce conseil s’adresse dans mon esprit à toutes les religions en vertu de la laïcité», a appuyé Jean-Pierre Chevènement.
Sur la question du burkini, qui divise les politiques y compris au sein même du gouvernement, l’ancien sénateur du Territoire de Belfort estime qu’il y a une «confusion».«On parle d’un problème de laïcité là où il n’y en a pas vraiment. La plage est un espace public. Tout ce que la loi n’interdit pas est permis, les moeurs sont libres», a-t-il d’abord minimisé. Avant d’ajouter: «Mais il y a un problème qui est celui de l’intégration. Toutes les vagues successives de l’immigration ont fait un effort pour coïncider avec les us et coutumes du pays d’accueil». «Je ne suis pas pour le communautarisme, je veux des principes communs, je suis pour le combat d’idées, l’égalité hommes-femmes.»
Jean-Pierre Chevènement a ainsi estimé que le burkini posait problème, défendant une laïcité stricte comme Manuel Valls. «Il vise à définir une place de la femme subordonnée à celle des hommes dans la société. On peut le tolérer mais on peut ne pas l’approuver», a commenté le futur président de la Fondation pour l’islam de France, pointant du doigt «la montée du fondamentalisme religieux».» L’immense majorité des femmes ne peuvent plus sortir dans la rue sans être voilée. Il est de mon devoir de rappeler qu’une certaine discrétion est souhaitable.»
Créé par sr07 le 15 août 2016 | Dans : Le Che
Questionné sur son conseil de discrétion il répond :
Avant de me laisser entraîner dans une polémique subalterne et stupide, je voudrais rappeler qu’en 1999, j’ai lancé une consultation de toutes les sensibilités de l’Islam, qui a abouti à la rédaction d’un texte, « Principes régissant les rapports entre la puissance publique et le culte musulman », et que sur cette base, nous avons travaillé, des hauts fonctionnaires des finances, de l’Intérieur, des autorités musulmanes, et nous avons dégagé un certain nombre de pistes, par exemple celle des baux emphytéotiques, qui ont été largement utilisés, et qui ont permis de combler de graves lacunes qui existaient à cette époque-là, et il en existe encore. Je voudrai montrer que la république a déjà agi.
Maintenant vous m’interrogez sur la « discrétion », je ne vais pas me dérober à cette question. Nous sommes une république laïque, cela veut dire que nous distinguons un espace public, qui est un espace laïque, dans lequel les citoyens, à égalité, sans qu’il soit question de leur origine ou de leur religion, débattent. Si possible avec des arguments raisonnables, à la lumière de la raison naturelle, pour définir ce qui est l’interêt général de la République. Et puis, il y a l’espace religieux, où chacun est libre. La laïcité a pour but d’épanouir la spiritualité, elle n’est pas dirigée contre la religion, elle est mal comprise aujourd’hui. Par conséquent, la spiritualité est une chose, elle peut se développer librement, et chacun peut y trouver des motivations pour son engagement, mais dans l’espace public, on s’efforce d’avoir recours à des arguments raisonnables. J’ai repris l’expression employée par le recteur de la mosquée de Bordeaux, Tareq Obrou, qui a dit à mon avis à juste titre que naturellement les musulmans seraient bien inspirés de faire preuve d’une certaine discrétion, comme d’ailleurs tous les autres qui le font.
Je vous rappelle qu’on a demandé aux catholiques, aux juifs et aux protestants aussi de faire preuve d’une certaine discrétion, parce que dans l’espace public, c’est l’argumentation raisonnée qui l’emporte.
Je pense que les hommes politiques ont un certain devoir de responsabilité. Toutes les vagues antérieures de l’immigration en France, si l’on prend les immigrés venant de l’Europe centrale, polonais, ukrainiens, russes, arméniens, juifs, ou encore venant de l’Asie du Sud Est, ont fait quelques efforts pour adopter nos us et coutumes. Je pense que ce même effort est requis de tous. Il faut que chacun cherche à s’intégrer à la société française. L’intégration, ce n’est pas un gros mot, cela veut dire avoir accès aux codes sociaux qui permettent l’exercice des libertés, notamment des libertés civiques.
Tout le monde doit faire cet effort. Beaucoup le font, et le font sans peine, parce que cela ne les empêche pas du tout de garder leur quant à soi, leurs croyances, et leurs manières de faire.
L’identité française est mouvante, elle s’enrichit de leurs apports, mais chacun doit faire un effort pour que dans le cadre de la république laïque, ce soit la paix civile qui l’emporte. Et je ne me range pas du côté de tous ceux qui appellent à l’exaspération des communautarismes. Je ne pense pas qu’il faille encourager les provocations de quelque nature qu’elles soient, et je pense que ce qui est en jeu, c’est l’avenir de nos concitoyens de tradition musulmane dans la République française.
Créé par sr07 le 09 août 2016 | Dans : a1-Abc d'une critique de gauche. Le billet de XD, Le Che, Monde arabe, Proche et Moyen-Orient
Crédits photographiques du blog citoyen, socialiste et républicain.
J’ai relu ce matin ce livre écrit par Jean-Pierre Chevènement quatre années après la première guerre du Golfe. La justesse de sa vision de la poussée de l’intégrisme en pays musulman est, rétrospectivement, tout à fait saisissante! Les origines idéologiques de l’intégrisme, sa géographie et ses développements dans la fin du siècle dernier sont remarquablement exposés avec une prospective pénétrante. Après le désastre des interventions occidentales dans ces guerres pour le contrôle des gisements de pétrole ne subit-on pas à présent ce retour de bâton?
Cet essai, riche de références et d’expériences, met en perspective les questions géopolitiques, économiques, religieuses et culturelles autour de cet Orient dévasté dans sa confrontation avec les appétits d’une Amérique prédatrice et, dans son sillage, d’un Occident aveugle et sourd, prétendant toujours faire la guerre « au nom du droit » et conduire une « ingérence humanitaire ».
Cette approche intellectuelle et concrète de Jean-Pierre Chevènement, fruit d’un engagement précoce dans une vie politique d’une exceptionnelle densité, tranche en effet avec les discours convenus de ceux qui n’ont toujours pas mesuré les effets directs et collatéraux de cette diplomatie incohérente.
Je recommande à nos internautes la lecture de cet ouvrage qui débute par ces mots aujourd’hui chargés de sens :
« De Bagdad à Jérusalem et Gaza, d’Alger à Tunis, je n’ai entendu qu’une question : la Méditerranée, demain, deviendra-t-elle un enfer?
Et en mon for intérieur, j’ai souci pour la France ».
On trouvera surtout un éclairage très actuel et d’une grande pertinence sur ces questions dans les travaux de la fondation Res Publica dirigée par ce républicain laïc instruit d’une expérience concrète du monde arabe,- et ce, dès la guerre d’Algérie -, à la lecture et à la rencontre des grands penseurs et dirigeants du monde arabe et dans sa réflexion partagée avec les plus grands spécialistes de l’Islam et de l’Orient, parmi lesquels son ami, le regretté Jacques Berque.
Depuis l’annonce présidentielle d’une probable nomination de l’ancien ministre d’Etat à la tête de la fondation pour un islam de France, j’ai espoir en l’acceptation par l’intéressé d’une telle mission. Sa vision laïque, subtile et équilibrée et sa notoriété au sein du monde arabo-musulman sont un gage de capacité à accomplir une oeuvre d’une particulière nécessité dans cette période de confrontation de notre république aux crimes terroristes et à la violence de l’intégrisme.
Xavier Dumoulin